Sur les réseaux sociaux et dans les médias conservateurs, Sydney Sweeney est devenue malgré elle une idole dont le succès préfigurerait la fin du wokisme. Une nouvelle absurdité dont seule les conservateurs ont le secret.
Actuellement à l’affiche du la comédie romantique événement Tout sauf toi, du dernier film Marvel en date Madame Web, et de la bonne surprise horrifique Immaculée, le nom Sydney Sweeney est sur toutes les lèvres. Repérée dans des séries comme Euphoria et The White Lotus, puis dans le cinéma indépendant avec notamment Reality l’année dernière, l’actrice américaine est en passe de devenir une nouvelle star d’Hollywood.
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Mais à quel prix ? Car malgré elle, la comédienne est devenue un véritable sujet de société. La raison : son corps, terrain de toutes les convoitises qui déchaîne les passions sur les réseaux sociaux. Tantôt objectifiée, tantôt accusée de sexualiser elle-même son corps au détriment de la cause féministe, Sweeney enflamme.
Quand les républicains s’en mêlent
Récemment, bien malgré elle, Sydney Sweeney est devenue l’idole des Républicain·es sur Twitter. Le 2 mars, alors qu’elle présentait Saturday Night Live dans une robe noire décolletée, le compte du conservateur Richard Hanania, suivi par près de 100 000 followers, poste une vidéo d’elle en déclarant “le wokisme est mort“. Quelques jours plus tard, le quotidien canadien National Post publiait un article posant la question suivante : “Le bonnet D de Sydney Sweeney est-il annonciateur de la mort du wokisme ?” L’article mentionne par la suite ses “attraits volumineux” et son “buste plantureux”.
Selon leur logique, le physique de Sydney Sweeney – sa peau blanche, ses cheveux blonds, sa taille fine, et sa forte poitrine – représenterait le pire cauchemar de la gauche, à l’heure où le body positivity est de mise. Qu’à cela ne tienne, il ne leur en faut pas plus pour faire de la comédienne-productrice un totem de nostalgie de l’ancien temps, où la beauté était affaire d’unicité : “Nous avons passé des années à être réprimandés pour avoir désiré ou admiré la beauté – parce que la beauté est rare et excluante, et qu’exclure c’est haïr – ou du moins c’est ce que les fanatiques actuels de la diversité, de l’équité et de l’inclusion nous ont appris à accepter. Nous ne sommes pas censés admirer la beauté de Sweeney, mais nous l’avons fait quand même. Les temps changent. N’est-ce pas ?”, écrit la journaliste Amy Hamm dans son article.
C’était mieux avant
À les écouter, louer la beauté de Sydney Sweeney serait devenu un acte révolutionnaire, un doigt d’honneur au politiquement correct. Même son de cloche du côté du Spectator, média britannique qui crédite l’actrice d’Euphoria comme celle à qui l’on doit le retour du “vrai body positivity”. Selon Bridget Phetasy, l’autrice de l’article, Sweeney – lors de la présentation de SNL – “rit et rebondit d’une manière qu'[elle] n’a pas vue depuis des décennies” : “Pour toutes les personnes de moins de 25 ans, c’est peut-être la première fois qu’elles voient cela. Car le modèle de la blonde qui ricane avec une incroyable paire de seins a été totalement rayé de la carte, une créature dont la honte l’a conduite au bord de l’extinction.” Rien que ça.
Des lignes qui transpirent la bêtise et le passéisme mal placé, et font écho à un phénomène auxquels les réseaux sociaux ont particulièrement donné de la voix : le retour de mode de la tradwife. Après tout, l’actrice correspond physiquement à ce modèle perçu comme un idéal féminin sur TikTok : une femme blanche, blonde et plantureuse dédiée au bien-être de sa famille et à l’entretien de son logis.
Plus récemment, toujours sur le compte du politologue Richard Hanania (dont les liens avec l’extrême droite ont été révélés l’an passé), on peut lire la phrase “Les libéraux ont même perdu le contrôle des institutions les plus gays”, avec une photo de Sydney Sweeney aux GLAAD Media Awards, sorte d’équivalent LGBTQI+ des Oscars. Sans avoir rien demander, l’actrice de 26 ans devient aux yeux des conservateur·ices une véritable Marianne, une Che Guevara des tapis rouges avec pour mission le retour des codes de beautés sexistes et hétéronormés d’antan.
Si l’actrice n’a pas donné plus d’importance que cela à la polémique (est-elle seulement au courant ?), elle s’est récemment exprimé sur les commentaires constants dont son corps fait l’objet : “Je les vois mais je ne peux pas me permettre de réagir. Je ne sais pas comment l’expliquer – j’essaie encore de le comprendre moi-même. Les gens se sentent libres de parler de moi comme ils l’entendent, parce qu’ils croient que j’ai renoncé à ma vie. Que je ne suis plus un être humain, parce que je suis une actrice”, confiait-elle récemment à Variety.
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