Adaptée de Stephen King, Under the Dome constitue une des bonnes surprises américaines de l’année. Entre science-fiction et fable politique.
Depuis la fin de Lost et de l’inégale Terra Nova, il manquait à la télévision une série ambitieuse aux confins de la science-fiction et de la parabole politique, capable de faire le point sur notre époque. Falling Skies et Revolution auraient pu remplir cette mission, mais impossible d’y croire après quelques épisodes. L’iconoclaste Fringe vient de se terminer, The Walking Dead part dans tous les sens. L’adaptation du roman de Stephen King Under the Dome se présente désormais en candidate sérieuse.
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Après un développement sur Showtime, donc sur le câble, CBS a récupéré le projet et employé les grands moyens. Steven Spielberg à la production exécutive, accompagné par un grand ancien de Lost, Jack Bender, et l’un des scénaristes les plus expérimentés de la planète séries, Neal Baer, se sont portés au chevet de la création de Brian K. Vaughan – lui aussi un ancien de Lost, décidément.
Du point de vue comptable, le succès est pour l’instant total. Comme le révélait un article passionnant du site Vulture.com, la série pourrait servir d’exemple vertueux à tous les networks (grandes chaînes hertziennes) dont le modèle économique, reposant exclusivement sur la publicité et l’audience, se voit remis en questionpar l’éclatement structurel de l’offre de fiction à la télé US. Fait rare, la première saison d’Under the Dome était déjà intégralement amortie avant même sa diffusion, grâce au lucratif contrat de streaming signé avec Amazon, aux ventes internationales, ainsi qu’aux réductions d’impôts consenties par la Caroline du Nord, lieu de tournage principal. Avec plus de treize millions de personnes devant l’épisode inaugural le 24 juin, Under the Dome a finalement réalisé le meilleur démarrage d’un programme d’été à la télévision américaine depuis 2007. Double jackpot.
Ces données n’ont rien à voir avec la réussite artistique. Il se trouve néanmoins que le pilote d’Under the Dome est l’un des plus intrigants vus sur un network récemment. Même si la concurrence rivalise de fadeur, cela n’a rien d’anodin. L’affaire commence un matin à Chester’s Mills, petite ville du Maine. La terre tremble. Un semblant d’orage électromagnétique perturbe l’atmosphère. Subitement, une barrière translucide coupe les habitants du monde. Inutile d’essayer de la traverser : les sons ne passent pas à travers, les voitures et les avions s’y écrasent comme des fruits pourris, des adolescents tombent malade et délirent quand ils l’approchent.
Quelques dizaines d’âmes se retrouvent sous cloche, coincés si près et si loin de tout.
Under the Dome remet au goût du jour une histoire américaine classique, celle d’une communauté regroupée sur elle-même (des pionniers ?) en passe de découvrir la lutte entre la barbarie et la liberté – car il faudra bien un jour savoir qui a installé ce dôme et tenter d’en sortir. Elle le fait pour l’instant avec un solide sens des références, qui l’enrichissent sans la vampiriser. Lost s’impose comme une inspiration, mais les auteurs savent voir plus loin. Une référence directe est faite au Prisonnier, une autre à Star Trek. On pense à La Quatrième Dimension et au film de John Carpenter, Fog, où une petite ville portuaire ressemblant beaucoup à Chester’s Mills se voyait menacée par un épais brouillard. Souvent mystérieuse, parfois amusante et toujours coupante – détail gore, une pauvre vache se retrouve tranchée en deux assez rapidement -, Under the Dome pourrait devenir indispensable. Reste deux conditions avant de s’y adonner sans répit. Que ses faiblesses (un personnage d’ado psychopathe très pénible, notamment) s’évanouissent et que le potentiel politique du récit s’épaississe.
Olivier Joyard
Under the Dome le lundi sur CBS. Prochainement sur M6
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