« Kenny Powers » s’arrête et avec elle, une certaine idée de la bêtise masculine. Heureusement, la relève arrive avec « Hello Ladies ».
Comme depuis plusieurs années, l’heureuse tendance comique à la télévision américaine reste largement féminine. De Girls à The Mindy Project, en passant par Parks and Recreation ou Veep, l’humour le plus pointu et déluré sort de la bouche des filles, se mâtinant parfois d’une certaine mélancolie – dans ce cas précis, le néologisme « dramédie » s’impose. Tandis que Nurse Jackie vieillit plutôt bien (déjà cinq saisons, bientôt six), la nouveauté Orange Is the New Black, située dans une prison de filles, a éclairé l’été dernier. La roue tournera-t-elle bientôt ? Si la fin de 30 Rock et The Big C ou l’annulation de l’émouvante Enlightened ont porté un coup aux héroïnes puissantes nées entre la fin des années 2000 et le début de notre décennie, les hommes n’ont pas encore pris le pouvoir, en tout cas pas dans ce domaine-là. C’est peut-être le moment de s’intéresser à eux, d’autant qu’un duo assez spécial fait l’actualité de cette fin d’année. A tout seigneur, tout honneur.
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Kenny Powers, le personnage le plus beauf de la télévision mondiale, ancien joueur de base-ball surfant tant qu’il le peut sur sa gloire passée, vient d’offrir ses ultimes vannes dégradantes – y compris pour lui-même – la semaine dernière sur HBO. La chaîne câblée lui avait offert une quatrième saison de huit épisodes. Pour quoi faire ? Mener lors d’un dernier baroud de déshonneur sa mission de prosélyte du mauvais goût, du sexisme dans toutes ses acceptions, voire du racisme.
http://www.youtube.com/watch?v=Qy3jeAHM1Lk
Produite par le duo Will Ferrell/ Adam McKay, spécialisé depuis La Légende de Ron Burgundy (2004) dans la déconstruction du mâle américain dominant, réalisée alternativement par Jody Hill et l’intéressant David Gordon Green (Prince of Texas), Kenny Powers (Eastbound & Down en VO) a bénéficié de la présence d’un acteur fou et aussi brillant que ses bouclettes trop gominées : Danny McBride. Ce garçon au regard torve et triste reste plutôt méconnu dans nos contrées. On dira simplement qu’il a été la principale raison de rester fidèle au poste jusqu’au bout.
La relève Stephen Merchant
Pour le reste ? Depuis plusieurs années, aucune réelle évolution n’est venue égayer la série et son héros constamment outrageux et néanmoins perdu. La formule de Kenny Powers était claire dès le début (vulgarité + dépression), elle n’a jamais changé. Cela se voit d’autant plus dans la dernière saison, pas désagréable au demeurant, où certaines scènes apparaissaient comme des remakes à peine maquillés de situations passées – notamment entre Kenny et son meilleur ami, ou sa femme. Cet art du surplace, propre à l’art métronomique des séries, a atteint tout de même ici un niveau proche de la complaisance.
Si on dit bye-bye Kenny sans trop de regrets (bien qu’il nous manque déjà un peu), c’est aussi parce qu’autre type pas très glamour et un peu loser vient prendre doucement le relais de son prédécesseur stéroïdé. Hello Ladies vient d’achever sa première saison et depuis nos premières impressions plutôt positives, notre amour pour elle a décuplé.
C’est l’histoire de Stuart, un Englishman à Los Angeles, empêtré dans sa quête maladroite de l’amour. Il tente, il échoue, il recommence, ni plus ni moins. Il provoque le malaise partout où il passe mais le malaise est le seul moyen qu’il a trouvé pour communiquer. C’est un type normal, un genre de héros ordinaire de la haine de soi. Elégante dans sa recherche burlesque, dotée d’une bande-son iconoclaste (de Gerry Rafferty à Roxy Music), Hello Ladies est l’oeuvre du dégingandé Stephen Merchant, partenaire créatif de Ricky Gervais depuis plus de dix ans – ensemble, ils ont créé notamment The Office. Et si dans le duo, le vrai génie, c’était lui ?
http://www.youtube.com/watch?v=wPEYvhOL_dI
Kenny Powers saison 4 ; Hello Ladies saison 1 sur OCS Go
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