Arrivée sur Prime Video – pour celles et ceux qui ont le pass Warner – en mars, cette mini-série signée HBO met en scène Kate Winslet dans le rôle d’une dictatrice lunatique. Si la comédienne britannique est flamboyante dans ce rôle d’autocrate parano, la série, quant à elle, pêche à plusieurs endroits.
À l’heure où plusieurs dirigeants de grandes puissances mondiales, de Donald Trump à Javier Milei en passant par Vladimir Poutine, ressemblent à s’y méprendre à d’invraisemblables parodies d’eux-mêmes, quel pouvoir parodique reste-t-il à la fiction en général, et à la satire politique en particulier ? C’est la question que pose nécessairement The Regime, curiosité du catalogue HBO – débarquée en France sur Prime Video – dans laquelle Kate Winstlet (phénoménale) incarne une cheffe d’état à la poigne de fer, hypocondriaque, lunatique, paranoïaque, et dont les variations d’humeurs gouvernent la politique autoritaire.
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Le régime du titre, c’est l’autocratie en vigueur dans un pays imaginaire d’Europe centrale, mélange entre la Syldavie tintinesque et un ersatz de Mitteleuropa comme échappé du Grand Budapest Hotel de Wes Anderson. À sa tête : la chancelière Elena Vernham (Kate Winslet donc), leadeuse despotique aux nombreux caprices et aux curieuses lubies. La dernière en date ? La mesure méticuleuse du taux d’humidité de l’immense palais présidentiel, pour traquer le moindre signe d’une supposée invasion fongique.
Radiographie guignolesque
Autour d’elle, gravitent courtisan·es mielleux·euses et oligarques oiseux·euses, tous·tes asujetti·es à l’hypocondrie seigneuriale ; et un mari souffreteux (Guillaume Gallienne), pas plus téméraire que ses congénères pour affronter les sautes d’humeurs dictatoriales de son épouse. Et puis il y a Herbert Zubak (Matthias Schoenaerts), soldat déclassé au sobriquet éloquent (on le surnomme “le boucher”) fraîchement reconverti laquais, et chargé de talonner Sa Majesté, un hygromètre soudé à la main pour pister les fluctuations d’humidité. Entre Herbert et Elena, l’homme du peuple rustre et la souveraine hors-sol, va se nouer une curieuse relation d’emprise, aux retombées forcément venimeuses.
Radiographie guignolesque d’un régime autoritaire au bord de l’effondrement, The Regime est aussi (et surtout) un plongeon névrotique dans l’esprit détraqué de sa souveraine à l’humeur changeante, et dont les soubresauts émotionnels et les éruptions à rebonds sont finalement les signes d’une maladie mentale non traitée. La drôlerie et l’air de farce qui structure d’abord la série s’étiole à mesure que l’état psychique d’Elena s’aggrave, ombrageant le tableau d’une sinistre sentence.
Kate Winslet, exceptionnelle
La partition de Kate Winslet, en dirigeante cyclothymique, tantôt dame de fer inflexible, tantôt fillette éplorée et capricieuse, dialectise parfaitement le sujet véritable, et ô combien d’actualité, de la série : le destin d’une nation entière inféodé aux sautes d’humeur d’une souveraine maniaco-dépressive en roue libre.
Pour le reste, hélas, The Regime peine à convaincre. La faute, en partie, à son versant satirique effleuré et peu crédible. De ce pays jamais nommé, on ne verra finalement que la tour d’ivoire : un palais richement ornementé mais hermétiquement cadenassé. Le peuple, lui, est laissé hors-champ, tout comme les conséquences délétères de la politique autocratique du régime, à la merci des vents contraires balayant l’esprit tempétueux de sa despote.
Écrin de choix pour une tripotée d’acteur·ices au diapason (avec Kate Winslet en clef de Sol), The Regime est moins la farce politique mordante qu’elle ambitionne sûrement d’être, qu’un étrange objet composite, comédie pas vraiment comique et satire politique pas suffisamment politique.
The Regime, disponible sur Amazon Prime Video
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