Selon les chaînes de télévision, la fermeture de Megaupload pousserait les amateurs de séries vers les offres légales. Pour combien de temps ?
A la fermeture par le FBI du site de téléchargement direct Megaupload, le 20 janvier, les fans français en manque de séries envoyaient des SOS éplorés via les réseaux sociaux. Ignorant la panique ambiante, les chaînes de télévision affichaient au contraire leur satisfaction, évoquant un boom de la fréquentation de leurs sites de replay et de VOD.
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Le directeur du groupe M6, Nicolas de Tavernost annonçait début février : “Depuis quinze jours, nous constatons un trafic très important sur nos sites de TV replay (rattrapage gratuit de programmes), notamment celui de W9.” Le site de la chaîne de la TNT, qui propose des séries ados comme 90210, a vu son audience quadrupler. Du côté de Canal+, le directeur du cinéma Manuel Alduy constatait sur Twitter : “Fermeture de megamachin, la VOD de Canalplay (offre de VOD payante – ndlr) a pris 20 % en sept jours.”
Avant d’ajouter : “Quand tu butes un pirate, les gens se rabattent sur l’offre légale. Surprise ?”
Si le lien de cause à effet paraît évident, les internautes sont-ils prêts à changer durablement leurs habitudes et à ouvrir leur porte-monnaie pour assouvir leur passion des séries ? Les offres de replay sont gratuites, mais voir des séries américaines récentes, comme tout vrai fan le souhaite, coûte en moyenne 1,99 € l’épisode unitaire par la filière légale. C’est le créneau sur lequel s’est lancé il y a quelques années TF1, via le site mytf1vod.fr, qui propose notamment les nouveautés Alcatraz et Smash le lendemain de leur diffusion et les nouvelles saisons inédites de Dr House et Grey’s Anatomy.
Le nerf de la guerre : l’argent
Son directeur marketing, Pierre Olivier, reste prudent : “Nous constatons une augmentation du trafic d’environ 100 % sur les actes d’achat. Il y a des effets circonstanciels, comme l’arrivée de séries très attendues, et la vague de froid, qui favorise les achats à distance. Mais l’arrêt de Megaupload a clairement orienté vers nous des habitués du piratage. Certains croyaient à la légalité de ce site, puisqu’ils payaient ! Sur les forums, on constate que les gens réalisent seulement qu’une offre légale existe.” Reste le nerf de la guerre : l’argent.
Télécharger légalement une série coûte souvent à peine moins cher que d’acheter un DVD. La seule offre “illimitée”, celle de Canalplay, propose pour 10 euros par mois un catalogue de quarante séries, non récentes – et davantage de films, en respectant la chronologie des médias. Peut-on imaginer une baisse drastique du prix des épisodes ?
Alors qu’à Canal+, on ne commente pas cette éventualité, Pierre Olivier, à TF1, entrouvre une porte : “La VOD payante est un service en pleine croissance, mais actuellement, la taille du marché ne permet pas de faire baisser rationnellement les prix. Rien à voir avec la téléphonie mobile, qui est un créneau de masse ! Cela n’empêche pas qu’on réfléchit, comme tous ceux qui distribuent des droits, à des solutions plus proches de ce que souhaitent les consommateurs. Même si nous serons toujours plus chers en vendant quelque chose qu’en le proposant gratuitement, des offres de type cartes illimitées vont sûrement arriver. Mais nous devons d’abord fidéliser, car le numérique n’est pas sans coût.”
Si les internautes sériephiles ont déjà trouvé des alternatives à l’arrêt de Megaupload (autres sites de téléchargement direct, ou de peer to peer), l’événement ne restera pas sans conséquences sur le marché français de la VOD payante. Ce dernier est à l’aube d’un bouleversement majeur, que l’arrivée encore incertaine de Netflix (opérateur internet américain proposant des films et séries récents via des forfaits) pourrait brusquement accélérer.
Olivier Joyard
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