En ouvrant le quotidien d’un adolescent à un imaginaire issu des croyances amérindiennes, cette mini-série offre à son récit d’apprentissage un ancrage communautaire singulier.
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Jared, 17 ans, assume malgré lui des responsabilités d’adulte. Jonglant entre le lycée et son job alimentaire dans un fast-food, dont il truffe certaines commandes de cachets d’ecstasy confectionnés maison, il assume financièrement la charge d’une mère enfant à la santé mentale fragile et d’un père à la ramasse. Lorsqu’un étranger nommé Wade débarque en ville, son quotidien est troublé par des visions surnaturelles qui le poussent à questionner sa propre nature d’être humain.
Trickster coche toutes les cases de la série fantastique pour ados. Le corps en mutation et l’appréhension des pouvoirs sédimentent une crise d’identité nourrie par un secret de famille, et nouée à l’affrontement prophétique entre deux factions évoluant derrière le voile du réel. La série trouve néanmoins sa singularité dans l’ancrage quasi documentaire qu’elle offre à son récit, dont elle sème les graines fantastiques sur le terreau malade d’une région sinistrée.
Quête des origines et affirmation d’une identité menacée
Adaptée du roman Son of a Trickster d’Eden Robinson (2017), la série se déroule à Kitimat, en Colombie-Britannique, une province canadienne dotée d’une importante communauté d’ascendance amérindienne, rongée par le chômage, la pauvreté et l’alcoolisme et souffrant toujours de discriminations.
Naviguant entre familles dysfonctionnelles et géographie urbaine délabrée, les épisodes évoquent en creux le processus d’acculturation violent auquel ont été soumis les peuples indigènes, et en expriment symboliquement les tensions toujours vives à travers un projet de pipeline inscrit sur les terres des ancêtres.
Rien d’étonnant, à l’instar des récentes Ragnarök ou Jinns, à ce que l’imaginaire surnaturel de Trickster rejoigne des croyances locales, liant la quête des origines à l’affirmation d’une identité menacée. D’abord disséminées dans la toile du réel (arbres sculptés, légendes locales), les manifestations de l’outre-monde prennent une dimension plus spectaculaire avec l’apparition du Trickster (le Farceur) et des créatures qui l’affrontent.
Personnage mythique et métamorphe présent dans un grand nombre de cultures (on pourrait l’assimiler à Loki dans la mythologie nordique), il se caractérise par son individualisme anticonformiste et ses pulsions débordantes (notamment sexuelles). Quoi de mieux pour titiller un ado rebelle ?
Comme dans les séries précitées, Trickster échoue hélas à incarner cet imaginaire de façon convaincante, s’égarant dans des visions à la limite du nanar et en diluant l’impact dans des circonvolutions de récit dispensables. Plus que la promesse déçue d’une arborescence fantastique, on en retiendra plutôt la peinture sensible d’une adolescence atypique.
Trickster de Michelle Latimer et Tony Elliott, avec Joel Oulette, Crystle Lightning, Kalani Queypo… Sur Canal+
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