Trafic d’organes, survie, catastrophes et humour : les six épisodes de cette nouvelle série coréenne séduisent par leur énergie et leur intelligence.
Six fois 27 minutes, pas une de plus, ni une de moins : le sens de l’efficacité traverse Bargain : Le prix à payer jusque dans la durée mathématique de ses épisodes, sans que jamais cela ne pèse sur notre expérience de spectateur·rice franchement emballante. Une grande série ? Sans doute pas. Pas encore. Mais un objet assez énergique, insidieux et bizarre pour attirer l’attention bien au-delà de son pitch – qui d’ailleurs, porte en lui un mensonge à plusieurs étages.
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Car tout commence par une double fausse piste (désolé pour les spoilers) quand un type d’une quarantaine d’années se retrouve avec une jeune prostituée dans une chambre d’hôtel. Il veut sa virginité et il semble prêt à y mettre le prix. Sauf que tout cela n’est qu’une entourloupe visant à faire de lui le cobaye d’un terrifiant trafic d’organes.
Humanité en crise
On reste donc accroché·es à l’idée que l’on verra un innocent (mais l’est-il vraiment ?) se démener avec une forme de barbarie, avant que la deuxième fausse piste ne se dévoile. Une catastrophe (un tremblement de terre ?) frappe l’hôtel et tout le monde, cobaye, acheteur·euses et traficant·es, voit le sol (littéralement) s’effondrer sous leurs pieds. Les cartes sont rebattues. Il n’est plus question d’organes retirés de force à un mec qui hurle de peur. Là, enfin, Bargain : Le prix à payer se révèle pour ce qu’elle est : un genre de “survival” aux relents ultra violents, en même temps qu’une étude assez féroce de l’humanité en crise.
Au fil des six épisodes, on suivra donc l’ex-cobaye et l’ex-fausse prostituée dans leurs galères souvent sidérantes et claustro dans les décombres de l’hôtel, au gré d’une atmosphère de fin du monde absolument glaçante. A-t-on vraiment besoin de cela en ce moment ? Il se pourrait que oui.
Jeu de massacre
Écrite et dirigée par le même homme, Sung-Woo Jeon, un jeune réalisateur de 35 ans qui adapte un court métrage de son compatriote Lee Chung-hyeon sorti en 2015, la série profite de l’incroyable élan et de la curiosité entourant la Corée depuis quelques années. Elle partage d’ailleurs avec son illustre aînée Squid Game un goût pour le jeu de massacre et une façon de mettre en scène les failles béantes d’une société obsédée par l’argent. Le pilote, de ce point de vue, place le récit sur les rails : il est question uniquement et radicalement de ce qui est monnayable – soit à peu près tout – et du manque de limites qui caractérise l’époque contemporaine en conflit avec les limites de l’idée de civilisation. Les corps – de la prostituée, du cobaye – sont d’abord auscultés, presque exposés comme fragiles ou prenables, avant que le reste de la série ne montre, par un déchaînement de violence assez régulier, ce qui arrive quand le corps n’a plus rien d’un sanctuaire.
Tout cela n’est pas complètement nouveau, mais Bargain : Le prix à payer le fait avec une réelle dextérité, autour d’un choix qui pourrait ennuyer mais produit de beaux effets, notamment grâce à des acteur·rices ultra concerné·e.s : chaque épisode, sauf le dernier, est tourné en plan séquence, en un seul souffle qui offre une tension de tous les instants. Comme pour équilibrer ce tableau d’une noirceur assez folle, la série se permet aussi quelques incursions burlesques qui finissent de convaincre que nous sommes devant l’un des hits de l’automne.
Bargain : Le prix à payer. Sur Paramount +.
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