Grosse surprise pour les fans du Chevalier noir, et celleux qui ont grandi dans les années 1990, Netflix vient d’ajouter à son catalogue la série culte “Batman, The animated Serie”.
Septembre 1992. Une étrange épidémie semble soudainement contaminer la planète : des kids du monde entier se mettent subitement à arborer capes et masques noirs, jouent les justicier·ères dans la cour de récré, et dessinent de mystérieux symboles de chauve-souris sur leurs cahiers d’écolier·ères. C’est la Batmania.
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Trois ans plus tôt, sous l’impulsion de la Warner, Tim Burton signait avec son Batman (1989) un carton phénoménal au box-office mondial (411 millions de dollars engrangés, pour un budget de 35 millions) confirmant la forme olympique du chevalier noir, redéfini à la fin des années 1980 par les succès éditoriaux des comics Batman : Année 1 de Frank Miller ou The Killing Joke d’Alan Moore (entre autres). Batman y devenait un justicier sombre et ambivalent, parfois aussi trouble moralement que la galerie de vilains circassiens qu’il affronte sans relâche, s’éloignant sensiblement de l’imagerie pulp (et goulûment kitsch) qui lui collait à la peau depuis le serial de 1966 avec Adam West.
Garder la noirceur
C’est sur ce terreau ultra favorable que sort à la rentrée 1992 Batman, la série animée sur Fox Kids. En France, c’est Canal+ qui la diffuse dès décembre 1992, avant que France 3 ne lui assure l’adhésion durable des kids d’alors au gré de rediffusions dans des programmes rassembleurs (Télétaz, Les Minikeums) tout au long des années 1990.
Les créateurs Bruce Timm et Eric Radomski, scénaristes férus de comics, y faisaient un pari audacieux : développer une série animée destinée aux enfants qui ne renierait pas la part d’ombre et l’écrin de noirceur liés à Batman et à ses sinistres ennemi·es, et que Frank Miller, Alan Moore et même Tim Burton (à sa manière, donc gothique) avaient replacés au cœur du personnage : orphelin traumatisé par la mort de ses parents, qui se grime en chauve-souris pour inspirer la peur à ses ennemi·es.
Gotham et ses gratte-ciel art déco
Un exercice d’équilibriste funambule relevé haut la main : Batman y devient une ombre féline, traquant les vilain·es dans un Gotham invariablement ténébreux et hors du temps, où flottent, au-dessus de gratte-ciel art déco comme échappés du Metropolis de Fritz Lang, les zeppelins de la police dans un ciel rougeoyant, annonciateur des forfaits qu’ourdissent, dans les bas-fonds de la ville, une poignée de gangsters chandlerien·nes prêt·es à passer l’action.
Le générique, archi-culte, qu’accompagne le thème principal (non moins culte) du film de 1989 composé par Danny Elfman, est à ce titre hautement programmatique. S’y bousculent toutes les références esthétiques ayant présidé à la fabrication de la série : une architecture art déco délibérément anachronique, un parfum de film noir très années 1930, et l’ombre vénéneuse de l’expressionnisme allemand, Le Cabinet du docteur Caligari est nommément cité parmi les influences majeures.
Mélancolie vaporeuse
Mais c’est plus encore le travail d’écriture sur les personnages – et particulièrement les vilain·es – qui hisse la série animée au panthéon des meilleures adaptations du chevalier noir à l’écran. Puisant dans 60 ans de publications DC Comics et presque autant d’antagonistes divers·es et varié·es, les scénaristes réemploient les vilain·es mythiques du “batverse” et creusent les soubassements de leur histoire, s’attachant à décortiquer la part de folie à l’origine de leur disjonction.
Ainsi le Joker (interprété par Mark Hamill dans la version originale), Double-Face (terrorisant), le Sphinx, Poison Ivy, Mr. Freeze ou encore Harley Quinn (ancienne psychiatre du Joker devenue son amante, créée spécialement pour la série) apparaissent moins unidimensionnels, et sujets, comme Batman lui-même, à des traumas anciens, fondateurs de leur psychopathie et d’une forme camouflée de trouble dissociatif de la personnalité. Une pointe de psychologie, et un soupçon de tragique, qui font flotter sur la résolution de chaque épisode (Batman y triomphe toujours) une mélancolie vaporeuse.
Série pour enfant à la noirceur racée, fidèle au matériau d’origine autant qu’initiatrice d’une esthétique qui collera au personnage, la série animée Batman est un modèle d’adaptation qui aura marqué de manière indélébile les kids des années 1990. Son arrivée sur Netflix 30 plus tard devrait sans nul doute emporter les suffrages des jeunes (et moins jeunes) d’aujourd’hui.
Batman, la série animée, le 26 septembre sur Netflix
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