Issa Rae, la créatrice et actrice d’Insecure, suit toujours avec humour les tribulations sentimentales de trois femmes noires à Los Angeles. Une vision politique et sociale qui manque parfois de nerf dramatique.
Issa Rae promène son visage légèrement ahuri à un rythme qui n’appartient qu’à elle. Il aura fallu deux ans pour que la quatrième saison d’Insecure arrive jusqu’à nous, une petite éternité dans la temporalité normale de la télévision US, mais aussi une façon de vivre pour l’actrice-scénariste, qui a récemment ouvert un coffee-shop, joué dans deux films et même créé un label. Il fallait aussi du sang neuf pour sa série, ce qui a occasionné le départ de plusieurs scénaristes.
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Cette nouvelle bordée d’épisodes n’a pourtant pas vraiment le goût de l’inédit, au moins en ce qui concerne les cinq premiers que nous avons pu voir au moment d’écrire ces lignes. C’est à la fois la limite de la série et son charme persistant, sans qu’il ne soit toujours évident de décider qui l’emporte entre les deux.
Soleil, palmiers et restos sans gluten
Pour rappel, Insecure raconte la vie d’un groupe d’amies, Issa, Molly et Kelli, trois femmes noires dans le Los Angeles contemporain, avec des boulots plus ou moins stables, mais une vie qui, au fil des années, s’embourgeoise tranquillement. C’est même devenu l’un des sujets de la série, qui possède un don particulier pour montrer sans forcément dire.
Son décor principal d’Inglewood, quartier-ville du sud de Los Angeles autour de l’aéroport, a vu le prix de l’immobilier monter en flèche ces dernières années et se gentrifie à vue d’œil. Insecure capte cette transformation en promenant doucement sa caméra pour suivre les trajets des un·es et des autres, balayant cette géographie mouvante.
Sous le soleil, les palmiers et les nouveaux restos californiens sans gluten se dessine le cœur battant du récit, fait des trajets sentimentaux de ses héroïnes, en particulier Issa : elle se démène maintenant entre un plan cul régulier et les nouveaux désirs de son ex, Lawrence, en pleine relation avec une personne bien trop proche.
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C’est souvent dans sa manière de croquer naturellement le point de vue des femmes que la série brille, alors que les mecs restent des personnages périphériques mais regardés avec précision et empathie. Un retournement du regard simple et subtil, qui prouve que personne n’y perd dans cette équation – mais qui en aurait douté ?
La nouvelle saison intéresse notamment par le portrait qu’elle fait d’un jeune couple avec enfants, où la répartition des tâches s’organise de manière égalitaire. La vision d’Insecure est sociale et politique, même quand les scènes ont l’air simples, quotidiennes, sous le ton de la chronique.
Ronron narratif
Rae brille aussi particulièrement dans le burlesque pur, comme ce moment génial où son alter ego se débarrasse d’un préservatif coincé dans son vagin. On regrette même qu’elle ne donne pas plus de place à ces moments suspendus, hilarants, que personne d’autre aujourd’hui n’est capable de mettre en scène avec autant de légèreté et de drôlerie.
Car Insecure se repose parfois sur ses lauriers, cette espèce de ronron narratif où les événements sont rares. On appelle cela l’infusion lente, une manière de raconter des histoires qui semble appartenir plutôt aux autofictions des années 2010. On aimerait voir la série prendre davantage de risques, même si le confort qu’elle procure a quelque chose de profondément agréable.
Insecure saison 4 disponible sur OCS à partir du 12 avril
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