Malgré une mise en scène quelque peu excessive, Patria sonde avec application les blessures de la communauté basque à travers l’histoire de deux familles liées par un assassinat.
Comment panser les plaies d’une communauté meurtrie par des décennies d’oppositions idéologiques, d’exactions et de terrorisme ? A cette question vertigineuse, Patria n’apporte pas de réponse mais une piste, celle de l’intime, circonscrivant l’auscultation des blessures du conflit basque au chevet d’une poignée d’existences brisées à son contact.
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Adaptée du best-seller du même nom de Fernando Aramburu, la série, première création originale de la branche espagnole d’HBO, met en scène deux familles liées par un événement tragique. Dans les années 1990, Txato, le mari de Bittori, est abattu en pleine rue par Joxe Mari, fils de son amie Miren et jeune recrue de l’ETA. Lorsque l’organisation indépendantiste renonce à l’action armée en 2011, Bittori décide de retourner dans la ville où a eu lieu l’assassinat, malgré l’hostilité des habitant·es à son égard.
Scindée en deux lignes narratives qui encadrent les dernières décennies du conflit, Patria ne cesse d’opérer des points de contact entre les trajectoires personnelles de ses personnages et les soubresauts de l’histoire. Si les membres des deux familles réagissent au drame de façon très différente, c’est véritablement à travers les portraits de Bittori et de Miren, mères blessées mais déterminées, que s’expriment les divisions qui rongent la communauté. Au fil de leurs frictions s’esquisse également la possibilité du dialogue et du pardon, comme indispensables prérequis à la réconciliation.
Excès de pathos dispensable
On regrette hélas que cette fresque ambitieuse soit cousue de fil blanc, assignant chaque personnage à l’expression d’une facette du conflit et redoublant de procédés artificiels (notamment ces monologues truffés d’informations factuelles au cimetière et à l’église) pour expliciter le contexte au·à la spectateur·trice. Malgré la noirceur des événements qu’elle dépeint, Patria trouve le moyen de charger encore plus la barque de larmes en y ajoutant des tragédies médicales (annonce d’un cancer d’un côté, fille paralysée à la suite d’un AVC de l’autre), sombrant dans un excès de pathos dispensable.
En prenant soin de mettre en scène chaque aspect du conflit, de ménager un espace aux intérêts et aux peines de chacun·e (au mari assassiné répond le fils torturé en prison, aux voitures brûlées les violences policières…), Patria risque de se désengager de son sujet sensible. A ne vouloir froisser personne, on finit par renvoyer tout le monde dos à dos.
Patria Le 23 novembre sur Canal+
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