Chloë Sevigny est explosive dans Hit and Miss, une nouvelle série anglaise autour d’une tueuse transsexuelle.
S’il fallait recenser les très bonnes idées de séries sur le papier, Hit and Miss figurerait d’emblée assez haut dans la liste. Depuis plusieurs mois, les amateurs d’Angleterre et d’audace, deux mots qui vont bien ensemble, avaient repéré la nouvelle création de Paul Abbott (Shameless) comme l’une des plus excitantes de l’année. Le pitch ? L’histoire d’une trans, « une femme coincée dans un corps d’homme », comme le dit le personnage principal, Mia, qui occupe ses journées à buter des gens pour gagner sa vie et payer son opération à venir, tout en gobant des hormones.
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C’est une tueuse à gages avec des habits de femme, de beaux seins mais un sexe d’homme, même si elle espère que cet attribut ne lui restera pas trop longtemps entre les jambes. Comme si cela ne suffisait pas, Mia découvre que son ancienne petite amie, du temps où elle était encore un homme, vient de mourir et laisse derrière elle un petit garçon, son fils de huit ans. Résumons pour ceux qui n’auraient pas complètement suivi : transsexuelle + tueuse à gages + papa est une femme : Hit and Miss.
http://www.youtube.com/watch?v=4loJKcwhYWs
Depuis quelques semaines, il est désormais possible de juger sur pièces ces promesses alléchantes. Les premiers épisodes diffusés sur la chaîne câblée Sky Atlantic apportent avec eux une excellente nouvelle : sans jamais tomber dans l’outrance démonstrative, la série parvient à tirer le meilleur parti de l’univers déglingué qu’elle promettait, au point de s’imposer comme l’une des meilleures découvertes de l’année.
Le premier responsable est bien sûr Paul Abbott, son créateur, la cinquantaine loquace, figure importante du monde des séries british depuis plus de quinze ans. Les téléspectateurs français connaissent son travail par le biais de l’adaptation américaine de Shameless, dont la première saison a été diffusée l’an dernier sur Canal+. Abbott a conçu l’original anglais, qui dure depuis 2004 et a pour socle narratif des enfants vivant presque seuls avec un père irresponsable.
Formé à l’école du soap opera, il a développé au fil des années une touche très personnelle, à base de familles essentiellement compliquées, voire éclatées, toujours recomposées. Sa propre existence (sept frères et soeurs, des parents absents au dernier degré) fournit la sève d’un univers fictionnel singulier, qu’il parvient ici à faire vivre de manière totalement nouvelle. Lorsque Mia débarque pour s’occuper de son jeune fils, elle tombe sur une fratrie vivant dans une ferme isolée. Mettre en scène l’autarcie des enfants face à un monde adulte disparu des radars : l’obsession Abbott est toujours vivante.
L’héroïne de Hit And Miss doit apprendre à devenir père/mère, c’est-à-dire à s’occuper d’un autre qui a besoin d’elle, alors qu’elle avait focalisé sa vie sur sa propre transformation. Mêler la question de la paternité/maternité à celle du genre et de l’identité ressemble à un pari risqué, que la série réussit grâce à une fille prête à tout : Chloë Sevigny. L’actrice découverte par Larry Clark dans Kids au milieu des années 90 a depuis longtemps montré son goût pour l’aventure, que ce soit auprès de Vincent Gallo (The Brown Bunny en 2003) ou dans une série HBO sur les mormons (Big Love, 2006-2011).
Ici, elle obtient enfin un premier rôle à sa hauteur, jouant avec brio une femme en devenir, capable de haine contre le monde et d’une grande douceur avec ses proches. Sa présence butée impose un trouble permanent. La manière très crue dont la série montre ce sexe d’homme dont elle ne sait plus quoi faire est déjà entrée dans la mythologie pop contemporaine.
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