Ewan McGregor reprend du service dans la peau du célèbre chevalier Jedi, 17 ans après “La Revanche des Sith”. Mais passée la nostalgie cajoleuse, que valent vraiment les 2 premiers épisodes de la série de Hossein Amini?
Qu’est-ce que Star Wars a encore à nous raconter en 2022 ? À force de digressions, de spin-off indigents en séries indigestes, le mythe, loin de s’amplifier, a plutôt tendance à dangereusement s’amenuiser, comme tari par un essorage de franchise forcené, qui en aurait absorbé tout le substrat mythologique.
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Même les fans les plus zélés, du genre qui arpentent les conventions fourrure de Wookie sur le dos ou sabre laser en plastique à la main, commencent à montrer les premiers signes d’un désamour en gestation : en témoignent les retours tièdes du Livre de Boba Fett, dernière série Star Wars en date, épinglée par des fans courroucés, souvent pour les pires raisons (on lui a reproché d’abdiquer face à une supposée idéologie woke) parfois pour les bonnes (la série est tout simplement parfaitement ratée).
Personnage iconique
Mais face aux doléances embuées de fans pleurnicheurs s’indignant pour les mauvaises raisons, et le constat objectif de la perte d’éclat du mythe Star Wars, une série semblait faire l’unanimité, capable à elle-seule de rétablir l’équilibre dans la Force : Obi-Wan Kenobi. D’abord parce qu’elle signe le retour d’un personnage iconique de la saga (et non plus d’un second couteau propulsé au premier plan), ensuite parce qu’elle promet de régénérer tout un pan de la saga qu’on pensait laissé aux oubliettes : la prélogie de George Lucas des années 2000.
Le temps fait curieusement son œuvre. Alors qu’en 2015 la machine promotionnelle autour du Réveil de la Force, premier segment de la postlogie initiée par J.J. Abrams, insistait lourdement sur un retour aux origines de la saga – un hommage à la trilogie originelle pour essuyer l’affront de la prélogie de 1999, longtemps conspuée – la hype autour de Obi-Wan Kenobi semble paradoxalement tenir à la réitération de cette trilogie boiteuse, bien moins mal aimée qu’on voudrait le croire. C’est que les marmots d’hier, qui on découvert Star Wars dans les salles obscures avec La Menace Fantôme, sont devenus les trentenaires d’aujourd’hui, et que la nostalgie comme un envoûtement altère les sens et la raison.
La série n’évite pas le piège qui la guettait
La série de Hossein Amini (scénariste de Gangs of New York et showrunner de L’Aliéniste) ne s’y trompe pas, et s’ouvre sur un long résumé des événements de la prélogie : la découverte d’Anakin Skywalker, l’élu censé rétablir l’équilibre dans la Force, sa formation Jedi sous l’égide d’Obi-Wan Kenobi, son basculement vers le côté obscur, l’effondrement de la République et l’avènement de Dark Vador. Puis nous retrouvons Kenobi (à nouveau sous les traits d’Ewan McGregor) là où nous l’avions laissé à la fin de La Revanche des Sith, 17 ans plus tôt : reclus dans les plaines désertiques de Tatooine, où il veille de loin sur Luke Skywalker, le fils de son ancien disciple, devenu un seigneur Sith aux commandes de l’Empire.
C’est peu ou prou la situation initiale du premier Star Wars, sorti en 1977 : un garçon isolé sur une planète lointaine, promis à un destin qu’il ignore, protégé par un étrange ermite. Et c’est bien là le problème : en investissant un épisode de la saga laissé volontairement parcellaire – la vie d’ermite de Kenobi entre les deux trilogies – la série n’évite pas le piège qui la guettait, et parvient à soustraire encore un peu de magie au mythe, à force de remplissage.
Fan-service et pilote automatique
Comme on imagine mal Disney faire le choix d’une série purement contemplative, où l’on suivrait simplement le quotidien d’un Obi-Wan désoeuvré, il faut bien justifier son retour au casse-pipe. Alors cap sur Aldorande, où la jeune princesse Leia est capturée par de mystérieux chasseurs de primes, tandis que, partout dans la Galaxie, des inquisiteurs impériaux traquent sans relâche les Jedi clandestins. De quoi pousser Obi-Wan à sortir de sa retraite anticipée, et reprendre du service.
S’il y a une certaine émotion à retrouver Ewan McGregor dans les guenilles usées d’un Obi-Wan fatigué, voire de découvrir une princesse Leia enfant, la série peine à nous faire oublier ce qu’elle est fondamentalement : une énième histoire liminaire, dont l’enjeu est moins sa résolution (puisqu’on sait qu’à la fin la situation sera revenue à la normale) que la gymnastique scénaristique qui la rendra plausible.
Passée la pointe d’émotion qui vient chatouiller notre fibre nostalgique, les deux premiers épisodes d’Obi-Wan Kenobi ne comportent pas de surprise, et remplissent méthodiquement leur fonction, quelque part entre fan-service et pilote automatique. Si on attendra la fin de la série pour émettre un avis définitif, on peut d’ores et déjà regretter que Star Wars soit devenu ce vaste générateur d’histoires informes, où chaque micro-zone d’ombre de la saga devient l’objet d’un récit tiré en longueur, oublié aussitôt avalé, et où la multiplication d’intrigues parallèles finit par rendre le tout uniformément anecdotique.
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