Adapté du bestseller éponyme des années 80, la nouvelle série disponible sur Amazon Prime Video revient sur l’enfance perdue et violentée de son héroïne sans parvenir à l’incarner de façon convaincante.
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A peu près tous les ados et préados des années 1980, en France et en Europe, ont lu le livre de l’Allemande Christiane Felscherinow inspiré de sa propre histoire, au point que Moi, Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée a sans doute eu, à l’époque, plus d’efficacité dans la lutte contre les ravages de l’héroïne que la plupart des campagnes de prévention. Un film où apparaît David Bowie a connu un franc succès. Quarante ans plus tard, une série s’empare de ce récit mythologique de l’enfance perdue et violentée, en huit épisodes drivés par la romancière et scénariste Annette Hesse.
Fallait-il vraiment revenir sur cette histoire à la fois emblématique et très marquée par une époque ? La série elle-même semble ne pas vraiment pouvoir répondre à la question. Située comme le livre et le film dans le Berlin des années 70, théâtre social et décor puissant, elle se permet en même temps une sorte d’intemporalité, à la fois dans les choix de certaines musiques et des costumes, comme pour situer l’histoire dans un couloir éternel de la jeunesse. Cela donne, étrangement, un sentiment de distance par rapport aux événements qui ne nous quitte jamais vraiment.
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Une descente aux enfers
La vie de cette jeune fille de douze ans (quand le récit commence) et de ses amis a beau être passionnante et tragique, c’est comme si la fiction restait à quai au profit d’un paquetage narratif et visuel omniprésent. Toutes les étapes de la descente aux enfers de Christiane et des autres sont décrites par le menu, leurs situations familiales à la fois délétères et banales, leur désir ado de trouver un sens à un quotidien sans excès, leur solitude profonde. Mais tout cela est déroulé d’une façon relativement mécanique, sans vraiment les regarder. Cela peut sembler paradoxal tant la caméra reste collée à elles et eux, pourtant, les personnages de Moi, Christiane F. n’existent pas réellement. Ils sont avant tout des figures destinées à faire avancer le navire-série à bon port.
Au fond, le vrai personnage principal de la série s’appelle la drogue, que Christiane et ses amis découvrent peu à peu avant de vivre avec quotidiennement. Et de ce point de vue, on a rarement vu une représentation aussi ratée des trips, montées et descentes provoquées par les injections, comme si on pouvait encore montrer des personnages qui planent sur fond sonore et visuel clinquant, créant une sorte de porno-choc involontaire lié à l’héroïne. Dans sa première saison, Euphoria (mettant en scène d’autres drogues, certes) trouvait bien d’autres moyens de lier le moment de la prise de substances à l’intimité de ses personnages.
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Christiane F. et David Bowie
On peut ajouter à ce raté fondateur une manière de filmer la violence (y compris sexuelle) commise contre ces enfants absolument irréfléchie. Et cela donne une série d’autant plus décevante qu’elle avait l’occasion de nous immerger dans des vies complexes et rudes. A la place, Christiane F. offre un genre de carnaval pas toujours complètement désagréable auquel il est difficile de s’attacher, si ce n’est à travers quelques comédien·nes et en écoutant les chansons de Bowie, omniprésentes dans le BO.
Moi, Christiane F. Sur Amazon Prime.
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