Sur une trame classique – une policière tente de trouver le coupable de la mort d’une ado dans une petite ville de Pennsylvanie –, cette mini-série vaut surtout pour son efficacité et son personnage féminin.
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La recette est éprouvée depuis longtemps. Dans une petite ville quelque part en Amérique profonde où l’ennui paraît figer les âmes, le danger rôde, des disparitions inquiétantes ont lieu. Quand une représentante de la loi s’empare de l’affaire, une lente exploration communautaire et intime débute.
Le modèle de base de ce récit, le patient zéro d’une certaine manière, est apparu dans les séries contemporaines avec la planante True Detective. D’autres ont pris le relais jusqu’à très récemment – on pense à Sharp Objects. Mare of Easttown ne cache en rien son appartenance à cette lignée, qui a enfin compris que les héroïnes pouvaient remplacer au moins un temps les figures de flics masculins lessivés par la vie que nous avions tant l’habitude de croiser.
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Mare a une quarantaine d’années. Elle travaille comme policière dans une bourgade de Pennsylvanie, où il y a un quart de siècle elle fut la star d’un soir dans son lycée pour avoir rentré un panier décisif lors d’un match de basket. Autant dire que de cet âge d’or il ne lui reste rien. Cette femme semble étrangement absente à elle-même et nous comprenons assez vite à quel point son histoire personnelle terrible (un enfant suicidé) est responsable de son état ankylosé.
Une fiction à double entrée
Comment retrouver une flamme, réveiller un corps, remettre du désir dans l’équation du quotidien ? Cette question traverse le meilleur de Mare of Easttown, qui se déploie dans les cinq premiers épisodes que nous avons pu voir – sept sont prévus – comme une fiction à double entrée.
Il y a d’une part l’enquête menée par Mare et son partenaire Colin Zabel (joué par l’excellent Evan Peters, vu dans Pose) à la suite de la mort d’une adolescente et de l’enlèvement probable de deux autres.
La série enfile élégamment les perles vues et revues de la série policière “adulte” où les interrogatoires renvoient souvent à des abîmes existentiels. Il faut attendre un certain temps pour être captivé·e, mais cela finit inévitablement par arriver. L’efficacité de Mare of Easttown a beau survenir tardivement, elle est bien réelle et en même temps un peu surannée. Comme un passage obligé de chaque côté de l’écran.
D’autre part, ce qui intéresse vraiment Brad Ingelsby, le créateur, se situe clairement ailleurs. Et on peut le résumer en deux fois deux mots : Kate Winslet et Mare Sheehan – son personnage. L’actrice de Titanic et de la belle mini-série de Todd Haynes Mildred Pierce trouve ici un rôle à sa mesure actuelle, qu’elle habite sans hésiter avec un mélange de mauvaise humeur bougonne et de pesanteur terrienne.
Son rapport aux hommes, notamment, fait mouche instantanément dans des scènes franchement bouleversantes. C’est assez captivant et surtout très personnel, du point de vue du jeu comme de l’écriture, plein d’une vérité que l’on ne soupçonne pas dans la série au premier abord et qu’on ne retrouve pas non plus tout le temps.
Ainsi va notre rapport à cette histoire si reconnaissable et néanmoins accrocheuse, un rapport fluctuant, fait de brusques montées émotives que l’on croyait impossibles. Mare of Easttown n’est sans doute pas une grande série, mais s’impose comme une bonne série à une époque où le niveau baisse. C’est déjà beaucoup.
Mare of Easttown de Brad Ingelsby, avec Kate Winslet, Julianne Nicholson, Jean Smart. Sur OCS
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