Si l’on avait été charmé par la première partie de Lupin, les nouveaux épisodes de la relecture des aventures du gentleman cambrioleur déçoivent en diluant le potentiel ludique et la charge politique du projet.
La découverte en janvier dernier des premiers épisodes de Lupin, relecture contemporaine des écrits de Maurice Leblanc diffusée sur Netflix, avait constitué une agréable surprise. Boostée par le charme d’Omar Sy, très à l’aise dans les habits symboliques du gentleman cambrioleur (il y incarne Assane Diop, un immigré sénégalais qui en perpétue l’art et la manière), la série créée par George Kay nouait un dialogue ludique avec l’œuvre originale et dépoussiérait le genre un peu moribond du feuilleton d’aventures policier en le frottant à des enjeux sociaux contemporains.
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Les nouveaux épisodes constituent une déception à la mesure de la promesse esquissée par leurs prédécesseurs : confus et répétitifs, ils ne cessent d’exhiber les faiblesses d’une entreprise dont les qualités inattendues nous avaient peut-être aveuglé·es. Mise en scène comme un mauvais téléfilm, plombée par une interprétation approximative et charcutée par des flashbacks aussi poussifs que dispensables sur la jeunesse des personnages, la quête de vérité qui oppose Assane à la puissante famille Pellegrini, responsable de la mort de son père, peine à capter notre attention. Lupin nous aurait-il joué un tour ?
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Une dialectique manichéenne
L’idée la plus lumineuse de la première partie consistait à insuffler la charge politique de la série dans la mécanique même des coups d’éclat d’Assane, qui s’appropriait à son avantage les processus de domination profondément ancrés dans la société. Qu’il cambriole le Louvre en passant par l’entrée des agents d’entretien, s’infiltre dans une prison en comptant sur le fait que les gardiens ne voient en lui qu’un “Noir comme un autre” ou échappe à la police en se déguisant en livreur de repas ubérisé, Diop retournait l’invisibilité contre les puissants pour mener, à sa manière, une forme de lutte des classes.
Dans les nouveaux épisodes, le sous-texte politique se fait plus épais et trouve comme principal support les répliques ouvertement racistes ou méprisantes des personnages assignés au camp des « méchants » : l’explication de texte a pris le pas sur le geste. Chaque camp étant clairement délimité, les figures de la série sont désormais renvoyées dos à dos dans un schématisme binaire et réducteur qui oppose bons flics et inspecteurs ripoux, journaliste intègre et présentateur vendu, cambrioleur au grand cœur et homme d’affaires sinistre.
De fait, le trouble qui enserrait la figure d’Assane Diop s’est dissipé à mesure que sa quête de justice a structuré ses activités illégales. Lupin ne vole plus, il restitue : la figure anarchiste de l’agitateur social est devenue un agent de l’ordre. Il faut attendre le bouquet final, confrontation opératique dans les coulisses d’un concert pour que se dessine une piste inattendue, inscrite dans une généalogie fictionnelle très dense, à même de raviver notre flamme de spectateur·trice : expert en infiltration, combattant hors pair et doté d’une classe à toute épreuve, Omar Sy n’est-il pas en train de devenir notre Tom Cruise / Ethan Hunt à nous ? De Lupin à Mission : Impossible, il n’y a peut-être qu’un pas.
Lupin : dans l’ombre d’Arsène partie 2, de George Kay, avec Omar Sy, Ludivine Sagnier, Clotilde Hesme… Le 11 juin sur Netflix
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