Dans la quatrième saison de l’inclassable “Barry”, le tueur à gages et apprenti comédien affronte les conséquences de ses actes et cherche la meilleure façon de quitter la scène.
Le visage tuméfié et l’esprit assailli par d’étranges visions, Barry fait les cent pas entre les murs d’une cour de prison. Prison physique, dans laquelle l’ancien Marine devenu tueur à gages a échoué après avoir été piégé par son prof de théâtre et le père d’une de ses victimes. Prison mentale, où les fragments d’une vie violente fulminent à la lisière de la folie.
Découvert en 2005 sur les plateaux du Saturday Night Live avant d’intégrer la galaxie Apatow, Bill Hader porte sur ses épaules cette série singulière dont il coécrit et réalise une bonne partie des épisodes, accompagné par son complice Alec Berg. Retraçant l’itinéraire d’un mercenaire solitaire qui trouve une famille d’accueil au sein d’une troupe de théâtre de Los Angeles, Barry conjugue des registres contraires. La satire en miroir du microcosme criminel et du monde du spectacle encapsule la crise existentielle de ses personnages, quand le jeu du chat et de la souris aux ressorts de farce sanglante auquel ils se livrent exprime peu à peu leur noirceur profonde.
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Exercice d’équilibriste
Il a fallu attendre la fin de la saison 2 pour que la série hisse cet exercice d’équilibriste à son plus haut potentiel, en libérant sa puissance cinétique et burlesque dans des morceaux de bravoure qui convoquaient autant les frères Coen et Wes Anderson que Buster Keaton. En tension permanente entre rigidité et élasticité, son clown triste tentait d’ordonner le chaos du monde dans des séquences à la mécanique dramatique ciselée : entre mèche à infusion lente et gags à triple détente, on ne sait jamais si ça va finir en éclat de rire ou en gerbe de sang.
Ce qui frappe dans les trois premiers épisodes de cette ultime saison est une impression de mouvement arrêté : rattrapé par son passé et coincé dans son pénitencier, Barry n’est plus le moteur de l’action mais le réceptacle des projections des autres personnages (prof, ex-copine, mentor criminel) qui tentent, chacun·e à leur manière, de digérer et de ressaisir son histoire.
Une fin pleine de panache
Un peu frustrant dans son exécution, qui s’encombre de divagations mentales poussives, ce retournement narratif a néanmoins un sens. Si l’on se demandait jusqu’ici comment la scène pouvait permettre une réinvention de soi, il s’agit désormais de trouver de quelle manière la quitter : en limitant les dégâts ou en faisant tout sauter ?
En repensant à deux fins de séries qui ont décomposé la chute de leurs personnages – Breaking Bad et Better Call Saul –, on pourrait envisager une voie médiane, qui chercherait l’étincelle d’humanité qui persiste au plus profond du Mal. Quoi qu’il en soit, on souhaite à Barry une sortie de piste à la hauteur de ses plus mémorables performances : imprévisible et pleine de panache.
Barry saison 4, de Bill Hader et Alec Berg, avec Bill Hader… Sur Prime Video (Pass Warner).
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