Si en France, la monarchie n’avait jamais été abolie ? Pari réussi pour la nouvelle et très drôle série de Géraldine de Margerie et Maxime Donz.
Il y a quelques mois, le duo Géraldine de Margerie/ Maxime Donzel (ex-Tutotal, sur le site d’Arte) avait décoiffé les comédies françaises avec la très plaisante Toutouyoutou, qui maquillait son étude amoureuse des femmes de plus de quarante ans en fiction d‘espionnage fofolle. Cette fois, il et elle emperruquent les séries d’ici avec Louis 28, sans doute la proposition la plus férocement hors cadre qu’on a vu depuis longtemps. Soit l’histoire uchronique d’une France contemporaine toujours monarchique, où le décès du roi dans un accident d’avion louche provoque une crise de régime et l’arrivée au pouvoir d’un ado de 16 ans. Son fils, qu’il ne connaissait pas. Lequel se demande ce qu’il fout là, lui qui cherchait juste à choper dans son lycée.
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Cédric (étonnant Nils Othenin Girard) a le regard benêt et les idées pas toujours très claires, tandis que sa mère (touchante Nadia Roz) a depuis longtemps coupé les ponts avec un milieu que de toute façon elle ne connaissait pas. Samia a élevé son fils en célibataire et ses origines arabes ne font pas d’elle une candidate naturelle à la haute société, où le pouvoir est détenu par quelques hommes à la fois racistes, homophobes et antisociaux.
De ce bingo ultra actuel et pour le moins flippant, les deux compères décident de tirer la sève la plus drôle possible, dans les arcanes d’une cour de France revue et corrigée par une forme de camp. Louis 28 fonctionne d’abord aux vannes, à la répartie de personnages qui vivent dans un milieu si normé que pour le rendre supportable, ils doivent viser très loin du sol. Dans ce contexte, on aime beaucoup les deux pestes jouées par Brice Michelini et Marie-France Alvarez, qui passent leurs journées à médire telles les deux vieux du Muppet Show, sans oublier une perfide Madame de Maintenant (Sarah Stern) qui cache son malheur sous la méchanceté.
Ping-pong verbal
Il y a toujours plusieurs niveaux de lecture dans Louis 28, au risque qu’ils s’annulent parfois entre eux. Mais la plupart du temps, le charme agit et le fun l’emporte. Un jeu de contrastes sociaux et politiques amusant se déploie entre les manières obséquieuses de la cour – notamment celles du régent véreux, joué par Gilles Gaston-Dreyfus – et le nouveau roi, qui ne s’intéresse pas au pouvoir et reste obsédé par ses stories et ses hormones. S’ensuit une bataille idéologique certes menée par des bras cassés, mais bien réelle, alors que les décrets liberticides s’enchaînent. Puis la jeunesse se réveille enfin. Tout cela se poursuit avec un projet de mariage gay dont on ne dira rien de plus, spoiler oblige.
Ce que la série raconte le mieux, en dehors de son incessant ping-pong verbal, ressemble finalement à un récit classique d’ado : le rapport d’une mère à son fils en l’absence de père, et l’adaptation de ce fils au monde et à ses propres désirs. Louis 28 fait preuve d’une fragilité émouvante quand elle met en scène des personnages en mal d’amour, bloqués par l’impossibilité de relations simples, franches, directes. Géraldine de Margerie et Maxime Donzel ont deux ou trois choses à nous dire sur le sujet. On regrette que le manque de moyens assez manifeste de la série, diffusée sur l’excellente plateforme France.tv Slash, les empêche d’aller encore plus loin. Qu’on leur donne un prime time, vite !
Louis 28 de Géraldine de Margerie et Maxime Donzel – Sur Francetv Slash à partir du 27 janvier.
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