Malgré la domination actuelle des filles sur le genre, quelques comédies interrogent la crise du mâle.
Devant la déferlante des bonnes comédies de filles comme Girls, New Girl ou The Mindy Project, pour ne parler que des plus récentes, on en oublierait presque que certains garçons aussi sont drôles à la télévision, ou essaient de l’être. Mais à quoi ressemblent-ils, ces mecs en passe de devenir minoritaires ? Restons concentrés sur trois d’entre eux, qui font l’actu séries de ce début d’année. Le premier, Ricky Gervais, est un pilier de la comédie télévisuelle depuis une décennie – se souvenir de The Office ou encore d’Extras. Sa dernière fantaisie, créée avec son compère Stephen Merchant pour HBO et BBC Two, était attendue par beaucoup d’amoureux d’un humour caustique, méchant et souvent percutant. Life’s Too Short raconte les mésaventures d’un nain (Warwick Davis) dans le monde du showbiz.
Sur le mode “mockumentary” (faux documentaire) dont ils ont l’habitude, Gervais, Merchant et leur nouvel ami explorent la vacuité des règles d’un milieu qu’ils connaissent par coeur. Un peu en roue libre à force d’autocitations amusées, cette sitcom d’une sécheresse totale déçoit un peu. Le politiquement incorrect, comme on nommait autrefois cet humour de mauvais esprit, atteint ici ses limites. Si Life’s Too Short retient tout de même notre attention, c’est moins grâce à ses guests prestigieux (Jerry Seinfeld, Johnny Depp, Steve Carell) que parce qu’elle met en scène sans complexes l’égoïsme éhonté de ses personnages. Un vrai sujet à creuser.
L’égoïsme est-il une plaie masculine ? Avançons l’hypothèse prudemment, même si dans Episodes aussi, la star est un mec à l’ego bêtement disproportionné, ne supportant pas de perdre une once de son pouvoir symbolique. Matt LeBlanc, ex-Joey de Friends, interprète ici une version exagérée de lui-même. Il s’amuse à sadiser un couple de scénaristes britanniques venus adapter leur série à Hollywood. Le style se rapproche du documentaire “fictionné”, comme chez Ricky Gervais, mais cette série de David Crane et Jeffrey Klarik, qui compte déjà deux saisons, se distingue par sa subtilité. Toute la machinerie hollywoodienne, dont elle scrute les coulisses avec précision, révèle peu à peu un monde aussi régressif que l’imaginaire du héros. Un monde d’hommes.
Si la régression égocentrique n’est certainement pas l’apanage des comédies masculines, elle fournit un socle toujours porteur quand il s’agit de mettre en avant la crise du mâle. 1600 Penn, dont le pilote a été diffusé en avant-première le 17 décembre, raconte la vie de famille du président des États-Unis. Au programme, un peu de saleté et de second degré dans les couloirs de la Maison Blanche, quelques mois après l’intéressante Veep et sa vice-présidente oisive. Mais ici, un homme sort du lot. À moins qu’il n’en soit pas encore vraiment un. Le fils irrécupérable du Président entame sa septième année de fac sans diplôme quand ses parents décident de le rapatrier auprès d’eux. En quelques minutes, il parvient à mettre le feu au Bureau ovale et à résoudre involontairement une crise diplomatique. Joué par Josh Gad, également cocréateur de la série, cet ado attardé renoue avec les figures masculines de certains teen movies des années 80, l’émotion en moins.
On espère que 1600 Penn, pour l’instant correcte, prendra bientôt de la hauteur. En attendant, il est permis de se pencher sur une excellente comédie masculine, l’incroyable Louie (non diffusée en France), où les problématiques de l’hétéro urbain quadragénaire sont sublimées. On y reviendra forcément.
Episodes saison 2 et Life’s Too Short saison 1, le samedi, 20 h 40 et 21 h 40, OCS Novo 1600 Penn à partir du 10 janvier, NBC