L’autofictionnelle Curb Your Enthusiasm de Larry David continue d’explorer l’humour de répétition sans que ses ressorts n’en paraissent émoussés.
Depuis l’an 2000, Larry David traîne sa carcasse d’escogriffe obsessionnel sur les écrans de HBO. Au début, le monde le voyait comme l’un des créateurs de Seinfeld, merveilleuse sitcom des années 1990 sublimant l’art du surplace – un art propre à ce genre répétitif et précis. Vingt ans plus tard, rien ou presque n’a changé. La dixième saison de Curb Your Enthusiasm, sa post-sitcom en forme d’autoportrait burlesque et misanthrope, montre toujours le désormais septuagénaire dans sa vie d’après.
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Il a beaucoup d’argent et s’ennuie un peu. La Californie des riches et ses maisons trop grandes, les cafés tièdes et les relations tendues avec le reste de l’humanité, tout est prétexte à enfoncer le clou de l’humour sur les convenances sociales et les mesquineries ordinaires, dont Larry David est une sorte de spécialiste surentraîné.
Une certaine idée de la gêne
Il est assez fascinant de constater que ses blagues, à peu près toujours construites sur un effet retard – un détail apparemment insignifiant se révèlera plus tard à l’origine d’un engrenage gênant et/ou fatal –, fonctionnent exactement de la même manière, souvent brillamment, comme l’atteste ce début de saison en grande forme, meilleur que la neuvième levée ne l’avait jamais été.
La joke la plus hilarante sur la présidence de Donald Trump arrive dans le premier épisode quand Larry, pour éviter un déjeuner avec un type envahissant, se pointe avec la fameuse casquette rouge “Make America Great Again” et fait fuir l’importun.
Ce qui interroge en revanche, c’est la capacité de David et de son alter ego fictionnel à incarner l’époque dans tous ses aspects. Le personnage central de Curb Your Enthusiasm s’est toujours démarqué par son désir de surjouer les codes associés aux hommes blancs vieillissants – ce que certain·es appellent l’anti-politiquement correct.
Dans ces nouveaux épisodes, le scénariste et acteur se met en scène imitant un accent espagnol lors de funérailles (il termine tête la première dans une poubelle, un moment très Marx Brothers) et accusé de harcèlement par des femmes (à tort, suite à un malentendu), ce qui a au moins le mérite d’être clair : par l’absurde, comme à son habitude, Larry David prouve que l’on peut encore rire de tout.
La limite du procédé, qui fait parfois passer la série de la drôlerie irrésistible à une forme de gêne déjà trop vue, tient à la façon qu’a l’intéressé de ne pas ouvrir le spectre de l’humour autant qu’il le pourrait. Mister David n’a jamais vraiment d’adversaire à sa hauteur dans l’art de la blague féroce, ce qui à terme peut emprisonner son génie.
Curb Your Enthusiasm saison 10 Sur OCS et OCS Go
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