Tout a commencé à cause d’un dénommé Mike, sur un vol de nuit Singapour-Paris. Après un échange de sièges digne d’une partie de Rubik’s Cube, Mike prit ma place et je me retrouvais à la sienne, trois rangs plus loin, à côté de Clotilde Hesme. L’actrice, qui a déjà investi les lieux, m’accueille en sortant […]
Tout a commencé à cause d’un dénommé Mike, sur un vol de nuit Singapour-Paris. Après un échange de sièges digne d’une partie de Rubik’s Cube, Mike prit ma place et je me retrouvais à la sienne, trois rangs plus loin, à côté de Clotilde Hesme. L’actrice, qui a déjà investi les lieux, m’accueille en sortant de son sac un brumisateur et en m’aspergeant le visage : “Il faut s’hydrater avant un vol”, rigole-t-elle. La coloc commence bien. On choisit de ne pas employer le volet amovible, seule séparation possible entre nos sièges, mais de définir quelques règles de notre vie commune éphémère : treize heures. L’actrice rentre du défilé Chanel Croisière à Singapour. Elle y a présenté le court métrage maison tourné par Karl Lagerfeld, qui retrace les débuts de Coco à Deauville en 1920. Clotilde joue la tante de Chanel (Keira Knightley). On se chamaille un peu pour savoir qui va lire en premier l’unique exemplaire du Monde disponible dans notre kiosque de fortune et découvrir ce qui s’est passé à Cleveland. Clotilde, qui parvient à porter avec classe les chaussons bleu Schtroumpf de la compagnie, cède rapidement. “Mais attention, je ne veux rien savoir. La dernière fois que j’ai lu un truc dans le genre dans Libé – l’histoire de deux parents qui avaient maltraité et au final tué leur gamine –, j’ai fait des cauchemars.”
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Deux heures du mat. Clotilde tente de me vendre Blancanieves, une adaptation espagnole de Blanche- Neige. “Elle a une vieille marâtre et une vie pourrie. Elle s’échappe dans la forêt et elle rencontre une équipe de toréadors nains. Pitché comme ça, ça a l’air étrange mais c‘est super.” Une heure plus tard, elle pique du nez devant A Royal Affair. Extinction des feux. Pendant la nuit, ses longues jambes se dressent et dessinent des cercles, à plusieurs reprises. “J’ai des impatiences”, me dit-elle au matin, devant des oeufs brouillés. Elle a hâte d’attaquer ses nouveaux projets de rentrée, au théâtre. “Je m’y sens plus autonome, moins infantilisée qu’au cinéma. Je ne suis pas coupée dans tous les sens”, explique-t-elle.
Dès son retour à Paris, elle commencera les lectures et répétitions de Comme il vous plaira de Shakespeare, mis en scène par Patrice Chéreau. “Il est d’une telle douceur, et d’une telle violence dans la douceur. Mais toujours juste. Travailler l’ambiguïté sexuelle avec lui, ça va être passionnant.” Clotilde joue Rosalinde, une femme qui se déguise en garçon pour séduire Orlando, afin que ce dernier devienne un amant parfait lorsqu’il reviendra vers elle. L’actrice enchaînera à Avignon avec Lear Is in Town, adaptée du Roi Lear de Shakespeare par Olivier Cadiot et Frédéric Boyer et mise en scène par Ludovic Lagarde. Elle y jouera plusieurs rôles, dont certains masculins. “Je me sens plus libre en jouant des rôles masculins. Cela me permet de dépasser certaines attentes et clichés qui peuvent m’ennuyer dans le fait d’être une actrice. Je pense qu’il faut dépasser la question du genre. Au théâtre c’est possible, au cinéma si l’on excepte Cate Blanchett qui joue Dylan, ça reste difficile.”
On entame la descente vers Paris. Clotilde parle des Revenants, la série de Canal+ dont elle va tourner la saison 2. “Une expérience exceptionnelle. Il y avait une sidération à ressentir l’émotion de revoir des gens qu’on a perdus. Je pense qu’on est parvenus à la transmettre. Le challenge, ça va être de trouver quelque chose d’aussi fort pour la saison 2. J’espère que je ne vais pas me retrouver à changer des couches dans mon pavillon avec mon alien! »
Lear Is in Town au Festival d’Avignon du 20 au 26 juillet
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