Avec son titre ironique, le drame policier anglais revient pour une deuxième saison, entre portrait de femme et cop show réaliste.
En partant du principe qu’une série qui profite de la moindre scène de bar pour passer une chanson des Stone Roses ne peut pas être complètement mauvaise, alors Happy Valley mérite toute notre attention. Même si, il faut l’avouer, ces raisons de crédibilité pop restent mineures dans le flot d’émotions convoqué ici.
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C’est assez simple, la création anglaise la plus adulée outre-Manche depuis sa victoire en 2015 aux Baftas (plus haute récompense télé pour l’Angleterre) palpite à chaque recoin des plans. Elle ne laisse jamais la moindre parcelle de récit se déployer ailleurs que dans le cadre intense du pathos.
Personnages criblés de drames
Enfants perdus, parents indignes, tristesse et traumas à tous les étages : la loi de l’émotion maximale touche la moindre âme qui bouge, des personnages tous criblés de drames, dans la tradition maussade mais prenante du “réalisme” social.
Elle s’exprime aussi dans le décor général de la série, celui d’une petite ville de province anglaise du Nord plutôt ouvrière, où l’alcool règne parfois sur les vies, où la pluie tombe un peu trop répétitive et où tout est connecté, puisque chacun se connaît de près ou de loin.
Ce genre de fiction insulaire, c’est-à-dire sans véritable dehors, très à la mode depuis longtemps, a été revampée par l’arrivée de Broadchurch. Mais il serait injuste de placer Happy Valley seulement dans cette filiation.
Un soap fait de bière tiède et d’effusions de sang
Son atout principal réside ailleurs, dans la figure qui en occupe le centre, Catherine Cawood (Sarah Lancashire), une femme flic hantée par la disparition de sa fille suicidée. Elle avait passé la saison 1 de la série à traquer celui qu’elle tenait pour responsable de cette horreur.
Quand la deuxième saison commence, le garçon croupit sous les verrous et apprend que sa propre mère a été tuée. C’est ainsi dans Happy Valley. Non seulement tout le monde se croise et partage des expériences difficiles, mais le pire semble toujours à venir.
Pour peu, on se croirait dans un soap fait de bière tiède et d’effusions de sang. Avec une poignée de suspects sur les bras, Catherine avance dans le noir, comme toujours. Elle parvient à rester debout malgré tout. On ne sait pas toujours comment.
C’est la première force de Happy Valley, créée, écrite et souvent réalisée par une seule personne, Sally Wainwright, dramaturge et scénariste qui tient ici l’œuvre de sa vie.
Toujours volontaire, y compris avec les causes perdues
Vue sous l’angle du portrait de femme, la série se révèle captivante car elle tient son personnage à bout de bras, le regarde en face à longueur de scènes, sans jamais le lâcher.
Souvent solitaire, toujours volontaire, y compris avec les causes perdues, plus douée pour aider les autres que pour s’aider elle-même, Catherine incarne une sorte d’ange retors, prêt à tout pour parvenir à ses fins, y compris se traîner dans la boue ou employer les méthodes les plus discutables.
Happy Valley lui offre un écrin dont il est difficile de sortir. Mais parfois, une mécanique rattrape l’émotion. Les scénarios usent de ficelles pour nous persuader que nous sommes plutôt devant un thriller psychologique et policier aussi sophistiqué que possible.
Efficacité narrative mâtinée de vérité humaine
C’est sûrement pour cette raison que Happy Valley connaît un indéniable succès : son efficacité narrative mâtinée de vérité humaine. Pourtant, à force de ne pas choisir entre le pur portrait et la fiction à rebondissements, un sentiment de fadeur et de répétition envahit l’écran.
Un chemin prévisible se trace et quelque chose dans l’intensité de la série semble surjoué. Plus dilettante, plus contemplative, Happy Valley aurait été géniale. En l’état, elle impressionne mais laisse un goût d’inachevé.
Happy Valley saison 2 à partir du 22 août, 20 h 50, Canal+
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