La série de HBO, qui adapte le jeu vidéo du même nom, débarque le 16 janvier en France sur Prime Video. On a pu voir les neuf épisodes : notre verdict sans spoilers.
C’est au bout d’un long suspense qu’on apprenait, jeudi 12 janvier, que la série la plus attendue du moment atterrirait finalement sur Prime Video en France. En récupérant le catalogue HBO, récemment perdu par OCS, la plateforme de streaming d’Amazon réalise le beau coup de ce début d’année et s’adjuge la diffusion française de The Last of Us, adaptation en série du célèbre jeu vidéo. Et s’il faudra souscrire à un “pass Warner” pour pouvoir regarder les séries légendaires de la chaîne câblée américaine (des Sopranos à The Wire), The Last of Us, rampe de lancement de ce nouveau deal, sera elle visible sans surcoût. Une première interrogation levée, restait à se concentrer sur la principale : la série est-elle à la hauteur des immenses attentes ?
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Cette question se double nécessairement d’une autre : était-il pertinent d’adapter en série un chef d’œuvre du jeu vidéo, mondialement acclamé pour ses qualités narratives – quitte à se faire taxer de “film interactif” par des hardcore gamers facilement irritables – et dont les graphismes, révolutionnaires à sa sortie il y a dix ans, n’ont pas pris une ride ? À cette interrogation légitime, la série de HBO répond sans détour dès son premier épisode : il s’agira d’adapter scrupuleusement (à quelques détails près) et avec une extrême fidélité, la trame narrative du premier opus en live action, en assumant pleinement la redite pour quiconque aurait joué au jeu.
Sortie en 2013 sur PlayStation 3, et édité par le mythique studio Naughty Dog, The Last of Us suivait l’itinéraire semé d’embûches de Joel, père de famille endeuillé par la mort de sa fille, et d’Ellie, jeune fille de 14 ans mystérieusement immunisée au virus qui, 20 ans plus tôt, a décimé la population mondiale. Pas de Covid-19 ici, mais une pandémie due au cordyceps, un champignon prenant le contrôle de quiconque y est confronté, et transformant les infecté·es en zombies assoiffés de sang. Devenu contrebandier dans le monde post-pandémique, Joel devra traverser des États-Unis en ruine, et constellés de petites communautés de survivant·es, afin de tirer de l’immunité providentielle d’Ellie, un vaccin capable de sauver l’humanité.
Road-trip désespéré
Rien de neuf sous le soleil post-apocalyptique : le succès de The Last of Us résidait moins dans son scénario qui en convoque d’autres – ou ses mécaniques de jeu (assez communes elles aussi) – que dans sa manière inédite de raconter une histoire bouleversante, cristallisé autour de la relation mouvante entre Joel, vieux briscard désillusionné et ravagé par le chagrin, et Ellie, jeune orpheline sans repères dans un monde qu’elle n’a connu que décimé.
La série de HBO est à l’image du jeu : un road trip désespéré, et longtemps dépressif, à travers les États-Unis, qu’illumine peu à peu la relation vaguement filiale qui unit ses héros dépareillé·es, superbement incarné·es par Pedro Pascal et Bella Ramsey (tous les deux passé·es par Game of Thrones).
Pilotée par Neil Druckmann himself (réalisateur et scénariste du jeu, ainsi que de sa suite parue en 2020) et Craig Mazin (showrunner de Chernobyl), The Last of Us peut compter sur le savoir-faire de ses deux tauliers – mais aussi sur la somptueuse musique de Gustavo Santaolalla, déjà compositeur sur le jeu – pour transmuter un jeu vidéo bouleversant en une série du même calibre, parvenant à partir d’un scénario post-apocalyptique ressassé et ordinairement grandiloquent, à ausculter l’intime, et interroger ce qu’il reste d’humain quand l’humanité semble dévoyée. C’est aussi vrai de la galerie de personnages que rencontreront Joel et Ellie sur leur route, tantôt retourné·es à l’état sauvage et capables d’une indicible violence, tantôt appliqué·es à recréer le monde à partir de ses ruines, comme un petit précis rousseauiste sur ce qui fait, fondamentalement, notre société.
Une immense série
Comme dans le jeu, c’est moins dans ses scènes d’action (pourtant spectaculaires et bénéficiant d’effets visuels bluffants) que dans les séquences d’accalmie qui les cernent – purs instants de contemplation et de petits riens qui font tout – que la série excelle. À cet égard, The Last of Us reprend parfaitement la recette Naughty Dog : une maîtrise narrative et une conscience de ses effets qui frisent parfois la prise d’otage émotionnelle. Mais, comme atteint·e du syndrome de Stockholm, on se laisse porter par cette histoire si simple en apparence qu’elle devient retorse en substance, et on en ressort une fois de plus essoré·e, bouleversé·e.
D’un chef d’œuvre du jeu vidéo, HBO a su tirer une immense série. Et si elle comportera peu de surprises (à quelques petites exceptions près) pour les joueur·euses ayant déjà accompagné manette en main les tribulations de Joel et Ellie, elle sera pour les autres une occasion de découvrir un récit post-apocalyptique à taille humaine, qui n’invente rien mais fait tout ce qu’elle entreprend à la perfection, quitte à passer, pour certain·es – comme ce fut le cas pour les détracteur·trices du jeu – pour un objet trop parfaitement conçu, et fabriqué sans laisser de place au doute. Pour notre part, on trouve ça extraordinaire.
The Last Of Us est diffusée en US+24 chaque semaine sur Amazon Prime Video.
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