La 70ème édition des Emmy Awards a rendu son verdict la nuit dernière. Retour sur ce palmarès diversifié et symbolique, comme en témoigne la faible présence des gros, le succès des nouvelles séries et, cette année encore, l’importance accordée aux femmes.
Pour sa soixante-dixième édition, la grande messe des séries aux Etats Unis qui s’est tenue la nuit dernière nous a concocté un palmarès étonnant quoique symbolique, car diversifié et prêtant attention à de nouvelles œuvres. Les premières séries « victimes » de ce renouvellement sont les deux grandes favorites des usines HBO, Game of Thrones (22 nominations) et Westworld (21 nominations), qui ne récoltent au total que trois récompenses. La saga médiéval-fantastique, dont la conclusion est attendue l’année prochaine, récolte tout de même l’Emmy de la meilleure série dramatique (pour la troisième fois) et du meilleur acteur dans un second rôle pour Peter Dinklage (égalant ainsi Aaron Paul et ses 3 prix dans la saga Breaking Bad) tandis que Westworld ne récolte que le prix de la meilleure actrice dans un second rôle (Thandie Newton).
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Succès pour les petites nouvelles
Deux séries mastodontes à la récolte maigre, ce qui profite à d’autres créations aux budgets bien plus cheap et qui ont su, chacune à leur façon, dynamisé le marché des séries. La première grande gagnante de cette moisson limitée des « gros », et la gagnante tout cours de la soirée, est Mme Maisel, femme fabuleuse (Amazon) qui récolte cinq prix : meilleure série comique, meilleure actrice (Rachel Brosnahan), meilleure actrice dans un second rôle (Alex Bornstein), meilleur scénario et réalisation pour Amy Sherman-Palladino (la showrunneuse). Une récompense aussi pour les femmes artistes, dans l’héritage de The Handmaid’s Tale qui avait tout raflé l’année dernière (voir plus bas). C’est la première fois qu’Amazon remporte l’un des deux Emmy suprêmes de la meilleure série.
Deux autres petites nouvelles ont su s’inscrire dans le palmarès de cette édition : Barry et ses deux prix pour le meilleur acteur (Bill Hader) et meilleur acteur dans un second rôle (Henry Wikler, dont c’est la première récompense après six tentatives en quarante ans dans le métier) ainsi que Godless (meilleur acteur et actrice dans un second rôle). The Americans, qui s’est conclue cette année avec une sixième saison, récolte deux beaux prix : l’interprétation masculine dans un drame et le scénario. Autre couronnée, The Crown (saison 2) avec le prix de la meilleure actrice dans un drame pour Claire Foy, pour la deuxième fois consécutive. On attendait Stranger Things 2 et Atlanta 2 dans le palmarès, mais il semble qu’il n’y avait plus de place pour elles. Quant à Twin Peaks – The Return, on hésite toujours à dire si c’était une bonne idée de la nommer cette année aux Emmy : représentée seulement dans neuf catégories techniques (grâce entre autres au trou de l’épisode 8), la saga créée par Lynch et Frost ne remporte aucune statuette.
Mrs. Maisel, digne héritière de The Handmaid’s Tale
The Marvelous Mrs. Maisel renoue avec la matière scénaristique du mélodrame classique hollywoodien, en lui apportant une tonalité comique. La série suit le parcours d’une mère au foyer à New-York en 1958, qui décide de se lancer dans le stand-up après que son mari l’ait quittée. Il est révélateur qu’Amy Sherman Palladinod ait remporté le trophée pour un scénario dont les tenants font penser à un film tel que Le Roman de Mildred Pierce, de Michael Curtiz, sorti en 1945, et qui évoquait déjà le combat moderne d’une femme dans un monde d’hommes. Si le symbole est fort, c’est parce qu’il est double : c’est à la fois le récit d’une femme qui est mis à l’honneur, et son interprétation par une actrice, Rachel Brosnahan dont le visage est nouveau (prix de la meilleure actrice), mais aussi le fait que ce soit une femme qui de bout en bout ait porté le projet (prix du meilleur scénario et de la meilleure réalisation pour Amy Sherman Palladinod).
Que nous dit le triomphe de la série écrite et réalisée par Amy Sherman Palladinod ? Sans doute que le petit écran s’impose de plus en plus comme un espace de visibilité – en tout d’expérimentation, pour des sujets de société restés jusqu’ici peu visibles. L’histoire, celle de l’industrie hollywoodienne, de ses rapports de forces et de pouvoir, mise en lumière par les récents événements de MeToo et de l’affaire Harvey Weinstein, ont changé la donne. Car les cinq statuettes remises à Amy Sherman-Palladino lors de la cérémonie incarnent un renouveau dans les thématiques de la production télévisuelle grand public, déjà incarné l’année dernière avec The Handmaid’s Tale, dystopie criante qui questionnait au prisme de la science-fiction les rapports de force genrés. The Marvelous Mrs. Maisel semble désormais se poser comme l’héritière, dans le genre de la comédie, de The Handmaid’s Tale, qui n’a gagné aucun prix cette année.
Le palmarès complet ci-dessous :
Meilleure comédie The Marvelous Mrs. Maisel
Meilleure série dramatique Game of Thrones
Meilleur acteur dans un second rôle (comédie) Henry Winkler (Barry)
Meilleure actrice dans un second rôle (comédie) Alex Borstein (The Marvelous Mrs. Maisel)
Meilleur scénario (comédie) Amy Sherman-Palladino, (The Marvelous Mrs. Maisel)
Meilleure réalisation (comédie) Amy Sherman-Palladino, (The Marvelous Mrs. Maisel)
Meilleure actrice dans une série, comédie Rachel Brosnahan (The Marvelous Mrs. Maisel)
Meilleur actrice dans un second rôle (mini-série ou téléfilm) Merritt Wever (Godless)
Meilleur acteur dans un second rôle (mini-série ou téléfilm) Jeff Daniels (Godless)
Meilleur scénario (mini-série, téléfilm) William Bridges, Charlie Brooker (USS Callister – Black Mirror)
Meilleure réalisation (mini-série ou téléfilm) Ryan Murphy (The Assassination Of Gianni Versace : American Crime Story)
Meilleure actrice dans une mini-série, téléfilm Regina King (Seven Seconds)
Meilleur acteur dans une mini-série, téléfilm Darren Criss (The Assassination of Gianni Versace : American Crime Story)
Meilleure scénario pour une émission de divertissement John Mulaney (John Mulaney : Kid Gorgeous At Radio City)
Meilleure réalisation pour une émission de divertissement Glenn Weiss (Oscars)
Meilleur acteur dans un second rôle (série dramatique) Peter Dinklage (Game of Thrones)
Meilleure actrice dans un second rôle (série dramatique) Thandie Newton (Westworld)
Meilleur scénario (série dramatique) Joel Fields et Joe Weisberg (The Americans)
Meilleure réalisation (série dramatique) Stephen Daldry (The Crown)
Meilleur acteur dans une série dramatique Matthew Rhys (The Americans)
Meilleure actrice dans une série dramatique Claire Foy (The Crown)
Meilleure compétition de téléréalité « Ru Paul’s Drag Race »
Meilleure émission de divertissement à sketchs Saturday Night Live
Meilleur émission de divertissement (talk-show) Last Week Tonight with John Oliver
Meilleure mini-série The Assassination of Gianni Versace : American Crime Story
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