“House of the Dragon”, une intrigue inédite dans l’univers de GOT et “Les Anneaux de pouvoir”, qui retrace des événements survenus plusieurs millénaires avant les aventures du “Seigneur des Anneaux”, marquent la prédominance de la fantasy sur l’imaginaire contemporain.
Adaptée du roman Feu et Sang de George R. R. Martin, House of the Dragon met en scène le déclin de la dynastie Targaryen, soumise à des luttes internes et externes, près de deux cents ans avant les événements de Game of Thrones. Tissant une intrigue inédite à partir des milliers de pages annexes consacrées par J. R. R. Tolkien à son univers, Les Anneaux de pouvoir relate la résurgence d’un mal ancien durant le Second Âge de la Terre du Milieu, plusieurs millénaires avant les aventures du Hobbit et du Seigneur des Anneaux.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
HBO versus Amazon
En déclinant à grands frais de tels succès populaires, la vénérable chaîne câblée HBO et le mastodonte Amazon, via son service de streaming Prime Video, enracinent un changement de paradigme économique sur un terreau labouré et participent de la prédominance de la fantasy sur l’imaginaire contemporain. S’il est trop tôt pour désigner le vainqueur de ce match attendu de longue date, on peut dénuder quelques fils qui en rendent les parties étonnamment complémentaires.
Malgré une volonté d’actualisation, traduite notamment par le recours à une distribution plus inclusive et une mise en avant de personnages féminins échappant aux codes narratifs traditionnels (la princesse Rhaenyra Targaryen ou la jeune Galadriel), les deux séries déclinent scrupuleusement les ingrédients des adaptations qui les ont précédées.
Puisant dans la tragédie grecque et Shakespeare comme dans Les Rois maudits, House of the Dragon orchestre patiemment une chronique du pouvoir où les tractations en coulisse blessent autant que les coups d’épée, mais manque d’ampleur mythologique. Elle semble abandonner la transcendance aux Anneaux de pouvoir qui, tout en reprenant trait pour trait la direction artistique mise en place par Peter Jackson dans ses deux trilogies cinématographiques, échoue pour le moment à donner corps aux figures qu’elle agite.
Un vieux fond conservateur
Si la débauche de moyens investis par Amazon (465 millions de dollars, droits d’adaptation compris) se voit effectivement à l’écran, cette nouvelle virée en Terre du Milieu ne se défait pas du vieux fond conservateur qui travaille l’œuvre de Tolkien et reconduit les mêmes récits d’honneur guerrier et d’amour courtois, lestée par un manichéisme suranné. Traquant la violence des rapports humains jusqu’aux chambres d’accouchement, House of the Dragon se révèle plus pertinente en mettant en scène des personnages complexes et faillibles, et en jouant de la temporalité sérielle pour déployer une narration elliptique.
Ce qui relie finalement les elfes aux dragons et les ruelles de Port-Réal aux rives de Valinor, c’est peut-être cette façon qu’ont les deux séries de gommer toute marge d’évocation et interprétation : privées de charge signifiante, leurs images ne valent que pour elles-mêmes, petites briques tautologiques agencées dans la trame d’un univers sous cloche. Une bulle qui n’est pas près d’éclater : à peine leurs diffusions entamées, les deux séries ont été renouvelées.
House of the Dragon saison 1, de Ryan J. Condal et George R. R. Martin, avec Paddy Considine, Emma d’Arcy, Matt Smith. Sur OCS depuis le 21 août.
Le Seigneur des Anneaux : Les Anneaux de pouvoir saison 1, de John D. Payne et Patrick McKay, avec Morfydd Clark, Markella Kavenagh. Sur Prime Video depuis le 2 septembre.
{"type":"Banniere-Basse"}