La nouvelle série de NBC utilise un vampire dans le seul but de pimenter un programme aussi fade que rocambolesque. Un choix qui sonne le glas des suceurs de sang, qui ont fait leur temps dans le paysage des séries.
« Vampires suck ». C’est un des jeux de mot les plus utilisés du moment pour parler des séries qui mettent en scène ces êtres aux canines acérées qui vouent une haine à l’ail et aux rayons du soleil. Mais grâce à Dracula, l’expression prend tout son sens. La nouvelle série de NBC, dont le premier épisode a été diffusé vendredi dernier, n’est pas seulement un calvaire à regarder. Elle incarne également les limites d’une « mode des vampires » usée jusqu’à la corde.
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Dracula mélange sexe, violence, conspiration, mystère, action et romance. Un cocktail qui pourrait s’avérer payant, mais qui, mal remué, laisse juste un arrière goût de n’importe quoi en bouche. Le problème, dans cette série focalisée sur un vampire, c’est qu’elle ne parle pas de vampire.
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Le sexy de True Blood sans ses codes
Dans la tête des scénaristes et des producteurs de séries, ces êtres surnaturels ne sont devenus rien de plus que des appâts à ménagère en chaleur, aussi brutaux que sexy, aussi utiles au récit qu’une pom-pom girl à la jupette raccourcie. On en oublierait presque qu’en 1997, les vampires que combattait Buffy ressemblaient plus à des monstres aux visages déformés qu’à des mannequins Abercrombie affublés de deux malheureuses dents un peu plus pointues que les autres.
NBC a ainsi sauté la tête la première dans ce qu’on appelle le piège « True Blood ». Aujourd’hui, la série de HBO n’en est, certes, plus qu’à alterner scènes de sexe et plans du torse nu d’Alexander Skasgard. Mais il ne faut pas oublier qu’elle a également soulevé de nombreuses questions quant à la vie desdits vampires, leur mode de fonctionnement, leurs codes et même la ségrégation dont ils étaient victimes. Si True Blood a rendu sexy les vampires, ses premières saisons ont également permis de traiter le sujet en profondeur et avec un grand talent – révolu depuis l’apparition de dizaines d’autres types d’êtres surnaturels dans la série, oui les panthères garou, c’est à vous que je parle.
Un Dracula noyé sous un surplus d’intrigues rocambolesques
En reprenant le côté affriolant de True Blood sans développer le moindre aspect de la spécificité des vampires (à part les classiques boire du sang et ne pas aimer le soleil), Dracula perd ainsi toute chance de séduire le public relativement adulte de la série de HBO.
A trop ignorer les caractéristiques de son protagoniste vampire pour se focaliser sur des intrigues aussi complexes qu’incompréhensibles, Dracula peut également faire ses adieux au public plus jeune, amateur de Vampire Diaries et de sa nouvelle petite sœur The Originals. Dans ce premier épisode, la série de NBC parle d’électricité, de source d’énergie sans fil digne de la meilleure connexion Wifi (en 1896), d’Ordre du Dragon et de réincarnation, tout cela entre deux mouvements de sourcil d’un Jonathan Rhys Meyers qu’on a rarement vu aussi fade.
Ce dernier semble d’ailleurs parler d’une série qui n’a rien à voir avec celle diffusée sur NBC :
« A cause de la manière dont on l’a poussé dans les films et à la télévision, lorsque les gens pensent à des vampires, ils pensent ‘sexe’. Nous, lorsqu’on pense à des vampires, on pense à leur souffrance. »
Et, l’acteur de continuer dans le Belfast Telegraph, sans craindre les contradictions :
« Je ne voulais pas que [mon personnage] morde le cou d’un homme: il garde ses dents pour les femmes. Il y a quelque chose de sexuel dans l’action de morde le cou de quelqu’un, et je voulais garder ça séparé du reste. »
Un paradoxe tellement gros qu’on en vient à se demander si Jonathan Rhys Meyers n’est pas secrètement aux commandes de toute la série.
Là où The Originals va cueillir son public sur le même arbre que Vampire Diaries, Dracula reste le cul entre deux chaises, incapable de séduire sur le tableau « adolescents » ou d’attirer (ou surtout garder) un public plus mûr. Lancer un programme qui fait autant abstraction de sa caractéristique principale a autant de sens que si The Walking Dead ne montrait jamais la tête décomposée d’un zombie en train de rogner l’os du bras d’un des personnages principaux à l’écran. Une hérésie.
Peut-être que tout l’intérêt de la série de Jonathan Rhys Meyers-qui-ne-veut-pas-morde-des-garçons-parce-que-ça-fait-trop-sexuel est là. De pousser à bout la logique d’utilisation de ces suceurs de sang à la mode pour que l’on en vienne, enfin, à endiguer la prolifération des programmes de la sorte. NBC ne le sait pas encore, mais elle vient peut-être de rendre un grand service au monde des séries.
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