Figure culte du western spaghetti, Django joue à nouveau des colts dans une version revisitée sous forme de série qui en approfondit l’inscription historique mais en dissipe la part de fascination et de mystère.
Un homme solitaire débarque dans un village à l’abandon en traînant un cercueil. Décidé à “nettoyer” la région, il s’immisce dans le conflit qui oppose d’ancien sudistes à une bande de brigands mexicains.
À sa sortie en 1966, Django de Sergio Corbucci a pour réputation d’être l’un des westerns les plus violents jamais produits. Doté au fil des ans d’une descendance pléthorique en grande partie illégitime – hormis une suite officielle tournée en 1987, la plupart des films en arborent le nom comme accroche commerciale –, il est remis en pleine lumière lorsque Quentin Tarantino insuffle sa violence expéditive et nihiliste à la trajectoire d’un ancien esclave en quête de vengeance dans Django Unchained (2012).
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Relecture en série
C’est en série qu’est aujourd’hui prolongé l’itinéraire sanglant du personnage, sous la forme d’une coproduction franco-italienne au casting international, comme aux grandes heures du western spaghetti. Hanté par le massacre de sa famille huit ans auparavant, Django (Matthias Schoenaerts, tout en sauvagerie maussade) finit par retrouver sa fille Sarah (Lisa Vicari, découverte dans la série allemande Dark) dans la cité utopique et délabrée de la Nouvelle Babylone.
Elle s’apprête à en épouser le fondateur John Ellis (Nicholas Pinnock), engagé dans une lutte retorse avec Elizabeth Turhman (Noomi Rapace, au jeu plombé par un invraisemblable accent sudiste), une notable de la région prête à tout pour récupérer les terres appartenant à son père. Terrifié à l’idée de perdre sa fille une seconde fois, Django prend les armes pour protéger la ville.
Une version de Django très explicative
Mis en scène par Francesca Comencini, David Evans et Enrico Maria Artale, les dix épisodes de cette (longue) saison soignent leur hommage au western avec une application un peu scolaire. Filmée en décors réels et servie par beau travail sur la lumière naturelle, l’intrigue déroule son lot de péripéties règlementaires. Alternant morceaux de bravoure et relâches intimistes, elle porte une attention particulière au contexte de l’époque (les années 1870), marqué par les stigmates de la guerre civile et la situation toujours difficile de la population noire malgré l’abolition de l’esclavage.
Raccord avec les questionnements contemporains, cette inscription historique et sociologique du récit assoit la singularité du projet tout en en figurant la limite, particulièrement lorsqu’elle s’applique au traitement du personnage de Django. Bloc de violence nihiliste au passé trouble et aux intentions changeantes dans la version originale, il voit ici chacune de ses actions lestées d’un appareil psychologique qui en altère le potentiel de sidération, et son passé déplié en pleine lumière dans une série de flashbacks qui en dissipent la part de mystère. Un passage d’objet à sujet qui fond l’arbitraire d’une présence en ressort narratif, et fait rentrer l’électron libre dans le rang.
Django saison 1, de Leonardo Fasoli et Maddalena Ravagli, avec Matthias Schoenaerts, Lisa Vicari, Nicholas Pinnock, Noomi Rapace… Sur Canal+.
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