Huit ans après un finale décevant, le tueur en série le plus célèbre de la télévision américaine reprend du service dans une nouvelle saison, en forme de reboot. Mais fallait-il vraiment exhumer une série qui avait déjà trop duré ?
“Je suis peut-être un monstre, mais un monstre qui a évolué”. C’est dans cette formule, prononcée par Dexter lui-même, que tient la promesse de Dexter : New Blood, nouvelle saison (la neuvième au bilan comptable) autant que reboot de la série phare de Showtime, huit ans après la diffusion de son épisode final controversé.
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Controversé parce que largement conspué par des fans décontenancé·es, qui n’y virent guère plus que la conclusion bâclée d’une série déjà en roue libre depuis quelques saisons. Cette nouvelle volée d’épisodes (10 sont prévus au total) a donc pour ambition de faire oublier les errances d’un finale assassiné par la critique, et de redonner vie à une série qu’on pensait enterrée pour de bon. Les tueurs en série en sont témoins, retourner sur les lieux du crime comporte des risques…
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Tueur en série éthique
Pour rappel, nous avions laissé notre tueur en série au grand cœur seul dans les bois du Grand Nord américain, reconverti ermite après avoir échappé de peu à la mort, abandonné sa femme et son fils (pour éviter de leur attirer des ennuis), et perdu Deb, sa sœur adorée, dans des circonstances tragiques. Près de 10 ans plus tard, Dexter (toujours sous les traits de Michael C. Hall), qui vit sous l’identité de Jim Lindsay pour échapper aux radars de la justice, semble mener une vie rangée d’homme des bois, loin de l’agitation fiévreuse de sa Floride natale, où repose désormais son ancienne vie de tueur en série spécialisé dans le meurtre de pédocriminels, maris violents et autres détraqués sexuels. Il habite un chalet cossu aux abords de la petite ville d’Iron Lake, dans l’État de New York, travaille dans une boutique locale de chasse et pêche, a une vie sociale bien remplie, entre sa petite amie Angela (une flic, qui ignore bien évidemment tout de son passé), ses collègues – des gens un peu simples du grand nord, du genre ploucs attachants – et les soirées hebdomadaires dans le rade local. Tout le monde semble adorer le nouveau Dexter, ou plutôt le très recommandable Jim Lindsay.
Une vie simple et tranquille : le secret du bonheur ? Peut-être bien. Mais c’est sans compter sur ces pulsions qui l’assaillent à la vue du sang, d’une entrecôte ou même d’un pot de ketchup. Car Dexter a beau être un tueur en série repenti, il lutte toujours pour ne pas succomber à ses anciens démons, à son addiction pour le sang qui le tiraille, comme un ancien toxico qui vacille à la vue d’une dose. Sauf que, sa drogue à lui, consiste à démembrer des salauds avec une hachette parfaitement aiguisée. Tout s’accélère lorsque le fils d’un magnat du pétrole local, du genre fils de bourge imbuvable, débarque à Iron Lake pour faire la fête avec ses potes aussi abrutis que lui. Ils passent par la boutique de Dexter, et lui achètent un fusil d’assaut dernier cri, un poil disproportionné pour aller chasser du gibier. De quoi intriguer Dexter, qui va mener l’enquête (un peu malgré lui), et, inévitablement, renouer avec son activité de tueur en série éthique.
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Bis repetita
Tout le premier épisode de Dexter : New Blood consiste à poser les conditions d’un retour quasi-intégral à la situation initiale de la saison 1, dans un nouveau décor, et avec pour seule nouveauté l’apparition de Harrison, le fils de Dexter, qui a réussi à retrouver son père, dont il ignore le passé mais suspecte sa part d’ombre. Dexter devra jongler entre son activité de tueur en série, son nouveau de statut de père – avec dans les bras un ado un brin désabusé – et sa relation de couple avec une flic, qui ignore tout de lui.
Franchement paresseux, les deux épisodes que nous avons pu voir ne comportent aucune surprise, et se contentent de rejouer les thématiques des premières saisons (la double vie de Dexter, ses questionnements moraux, ses pulsions monstrueuses) sans interroger le fondement d’une parfaite répétition de leurs enjeux. Mais plus encore, c’est l’aspect anachronique de la série qui dérange. Si le concept d’une série basée sur un tueur en série good guy était frais en 2006 – au sein d’une décennie qu’on qualifiera de troisième âge d’or de la télévision américaine (avec des séries de renom comme Les Soprano, Breaking Bad ou encore Mad Men), marquée par des (anti) héros tourmentés, à la moralité trouble, tueurs, menteurs, tricheurs (Tony Soprano, Walter White, Don Draper..) – il apparaît franchement daté en 2021. D’autant que la série, du moins dans ses deux premiers épisodes, n’innove en rien, pas plus dans le fond que dans la forme.
Si on attendra de voir les huit épisodes restants pour émettre un avis définitif, on se demande déjà si Clyde Phillips, le showrunner (déjà scénariste des premières saisons), n’aurait pas dû nous laisser sur l’image, certes décevante, d’un Dexter en ermite barbu, seul dans la forêt et loin de son passé criminel, plutôt que de le faire sortir des bois.
Dexter, New Blood, le 16 décembre sur Canal+
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