Diffusé sur Disney+, ce biopic en six épisodes du célèbre couturier espagnol retrace sa vie de son arrivée à Paris, en 1937, à sa mort, en 1972.
Côté séries, 2024 sera haute couture ou ne sera pas. En attendant de découvrir, en février sur Apple TV+, The New Look, centrée sur Christian Dior et Coco Chanel, puis, plus tard dans l’année, Kaiser Karl sur Disney+, consacrée au proverbial Karl Lagarfeld, c’est le couturier et styliste espagnol Cristóbal Balenciaga qui fait l’objet d’un biopic en six épisodes d’une heure. Également sous pavillon Disney+, elle retrace sa vie de son arrivée à Paris, en 1937, à sa mort, en 1972.
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Si, aujourd’hui, la marque Balenciaga incarne une certaine idée de la mode, hors-sol, hermétique et artificiellement subversive, écoulant ses sneakers difformes et ses jeans rapiécés au prix d’organes vitaux, il en fut autrement à la fondation de la maison en 1919. Mue par la quête opiniâtre d’une silhouette parfaite et l’exigence tatillonne de son maître couturier, elle creusa lentement mais sûrement son sillon dans le paysage de la mode et du luxe parisiens, jusqu’à en devenir l’une des références.
Un homme discret
Adoubé par ses pairs, proche de Coco Chanel et admiré par Christian Dior, Cristóbal Balenciaga s’imposa comme le “couturier des couturiers”, traversant les époques avec son invariable flegme et la recherche d’un absolu comme fil rouge de ses créations.
Mais de l’homme, finalement, on ne sait pas grand chose. La série pilotée par Lourdes Iglesias y remédie et nous fait pénétrer l’esprit insaisissable de ce grand couturier farouche, peu enclin aux mondanités que son milieu élevait pourtant au rang d’art, fuyant les projecteurs et les médias, et dont la timidité alliée au perfectionnisme avoisinaient l’austérité. C’est l’acteur madrilène Alberto San Juan qui lui prête sa silhouette élancé, son charme naturel et ce mélange de douceur et de rigidité, qui, semble-t-il, caractérisait Balenciaga.
Un classicisme un peu froid
Autour de lui gravite un casting franco-espagnol plutôt convaincant, avec notamment Gabrielle Lazure dans le rôle de Carmel Snow, journaliste mode au magazine Harper’s Bazaar, à qui le couturier accorda l’unique interview de sa vie, peu avant sa mort (et qui sert de point d’ancrage à la série), Patrice Thibaud en Christian Dior, et (surtout) Anouk Grinberg, impeccable en Coco Chanel. Dommage que le jonglage permanent entre l’espagnol et le français entrave par endroits le naturel des acteur·rices, dont le jeu dans leur langue non-native frise parfois la récitation.
La série est plastiquement très belle, bénéficiant d’une mise en scène racée et du travail monumental de la costumière allemande Bina Daigeler, qui a reproduit à l’identique les pièces emblématiques de Balenciaga avec un sens du détail impressionnant. Hélas, elle s’emmitoufle un peu paresseusement dans un classicisme froid, et s’avère peu aventureuse dès qu’il s’agit de dénicher les paradoxes qui constellèrent l’existence du styliste.
Cousue de fils blancs
Plutôt que de détricoter une vie qui s’encombra de complexité (un collaborateur et amant mort très jeune, un rapport trouble aux nazis pendant l’occupation, une personnalité opaque…), la série la coud de fils blancs et use de procédés éculés pour filer son récit. Comme ces flash-back sursignifiants qui la structurent, introduits par la remémoration des grands jalons de sa vie par Balenciaga himself, faisant face à son intervieweuse.
Finalement, Cristóbal Balenciaga la série est à l’image de Cristóbal Balenciaga l’homme (du moins comme il y est dépeint) : élégante mais austère, et un brin ennuyeuse.
Cristobal Balenciaga. Disponible sur Disney+
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