En perte de vitesse depuis quelques années, la série d’animation américaine a retrouvé un second souffle depuis la rentrée de septembre, avec une dix-huitième saison acide qui renoue avec une tradition d’humour absurde et de regard mordant sur la société.
La chanteuse Lorde est un homme. Ceux qui ont regardé la dix-huitième saison de South Park sont tous au courant. Les autres ne savent pas ce qu’ils loupent.
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Seize ans après son apparition sur le petit écran américain, la série d’animation signe, depuis la rentrée de septembre, une de ses meilleures saisons. Pas un épisode n’est diffusé sans être ensuite repris sur les réseaux sociaux et par les média anglo-saxons, friands du regard acerbe que South Park porte sur son époque.
Dernier exemple en date : l’épisode du 10 décembre dernier qui revenait sur les récentes accusations de viol contre l’acteur Bill Cosby. Maîtres dans l’art d’attaquer parfois très violemment les célébrités, les scénaristes de la série ont présenté l’acteur comme cherchant à droguer la chanteuse Taylor Swift. Le tout sur une parodie de « Baby it’s cold outside » (1944), chanson très populaire aux Etats-Unis et souvent chantée à la période des fêtes de Noël. Succès et reprises immédiats.
https://www.youtube.com/watch?v=sZ5dn6nDuv4
Une impression de répétition
Depuis quelques années, la série d’animation créée par Trey Parker et Matt Stone (qui font la plupart des voix masculines) avait commencé à perdre ce qui faisait son charme : sa fraîcheur, ses rebonds sur l’actualité et son absurdité parfois poussée à l’extrême. Les quatre enfants vulgaires qui ne grandissent jamais peinaient à faire rire le téléspectateur. On regardait South Park par habitude plus que par envie.
Où était passé le comique de répétition, si cher à la série, qui avait pris pour habitude de faire mourir Kenny, le compère à la capuche orange, à la fin de chaque épisode pendant ses cinq premières années ? South Park a, pendant une longue période, abandonné les running jokes au profit des épisodes unitaires que l’on pouvait picorer de ci, de là. Cela donnait paradoxalement une impression de répétition qui tirait vers la redondance.
Pourtant, Parker et Stone ont réussi l’impossible : relancer leur programme dans un paysage surchargé, où les séries d’animation n’ont jamais été aussi bonnes (on citera deux petites nouvelles, Rick & Morty et BoJack Horseman, grandioses). Cyniquement, on pourrait affirmer que les créateurs ont réussi leur coup en capitalisant sur leurs deux atouts : la critique de l’actualité, et Randy.
Quand Randy éclipse Cartman
Randy est le père de Stanley, le plus « normal » des quatre enfants. Mais Randy est surtout le personnage le plus drôle de la série. Doucement mais sûrement, ce quadra dépressif, aussi idiot qu’assuré, a remplacé Eric Cartman dans le coeur des fans, qui l’ont érigé en véritable héros du programme. La saison 18 évolue autour de lui, revenant régulièrement à l’une des meilleures idées des scénaristes : affirmer que la chanteuse Lorde n’est pas celle que l’on pense. Elle est en fait Randy, déguisé en femme, qui enregistre ses chansons dans ses toilettes, puis les diffuse à grand renfort d’auto-tune. La blague peut paraître potache, mais elle s’inscrit dans une tradition d’humour absurde que South Park avait négligé ces dernières années.
https://www.youtube.com/watch?v=ZxOMKtAKrh4
Mieux, la série renoue avec les private jokes et n’hésite pas à faire référence à ses épisodes précédents (la fascination de Randy pour la « cock magic », savoureusement obscène). La tactique est payante : les téléspectateurs se sentent plus impliqués et guettent les répliques cultes à chaque épisode.
L’actualité est, quant à elle, passée au crible, avec l’agressivité que l’on connaît à la série. Les créateurs d’applications mobile comme Candy Crush ont pris un bon coup derrière la tête quand Parker et Stone ont décidé de s’attaquer au modèle « freemium » (saison 18, épisode 6) pour en dénoncer les travers (une appli de jeu que l’on présente comme gratuite mais qui pousse à l’achat de ‘bonus’ payants pour avancer dans le jeu et nourrit le sentiment d’addiction).
Pilier de la chaîne câblée Comedy Central depuis 1997, South Park a été renouvelée en 2011 pour cinq années supplémentaires. Bonne nouvelle pour les fans de Lorde.
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