Située en Floride dans un salon de manucure, Claws propose d’entrer dans un monde où les femmes apprennent à se défendre contre les gros lourds. Une nouvelle série à découvrir.
Dès la première séquence de Claws, la nouvelle série de la chaîne qui monte aux Etats-Unis, TNT – avec notamment une adaptation en série de Snowpiercer de Bong Joon-ho dans les tuyaux –, quelque chose détonne. Trois femmes se retrouvent sur un parking pourri quelque part en Floride et font de l’endroit une scène glamour d’où exhalent leur pouvoir et leur joie.
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https://www.youtube.com/watch?v=ukuQM2R_Z6Q
Elles dansent tour à tour en bougeant leurs fesses, mais aucun homme ne les regarde. Elles font cela pour elles. Surtout, elles ne correspondent pas aux critères de la féminité bien sous tous rapports telle que la société les fantasme.
Un Nouvel An au pays où il ne fait jamais froid
La première, Desna (Niecy Nash, vue dans Masters of Sex et Scream Queens), est une femme noire aux courbes affirmées qui se trémousse dans un combishort ultradécolleté et ultramoulant, sur des bottines à talons. La deuxième, Jennifer (Jenn Lyon, ex-Justified), est une blonde pulpeuse en jean troué, bottes en daim et T-shirt délavé, à la démarche de go-go girl assumée. Enfin, la troisième s’appelle Ann (Judy Reyes, excellente dans Scrubs), une latina lesbienne butch en T-shirt blanc, chemise manches courtes et bermuda assorti, qui avance d’un air déterminé et provocant.
Toutes trois se préparent à fêter le Nouvel An au pays où il ne fait jamais froid… mais en attendant, elles entrent dans le salon de manucure où elles travaillent ensemble. Elles sont bientôt rejointes par leur collègue Polly (Carrie Preston, de True Blood notamment) dont on comprend, au vu du sémillant bracelet électronique qui lui enserre la cheville, qu’elle sort de prison.
La réalité n’a rien d’un rêve et quelques femmes travaillent à l’enchanter : voici la meilleure part du premier épisode de Claws (le mot signifie “griffes” en anglais), qui s’enroule subrepticement entre comédie outrée et drame stylé, en ne reculant quasiment jamais devant le kitsch, voire la vulgarité de l’univers et des personnages qu’elle met en scène.
Des situations impossibles et une intrusion du polar
La manière décomplexée et camp dont le showrunner Eliot Laurence s’empare d’une esthétique singulière et too much – un peu à l’image du nail art que proposent les héroïnes à leurs clientes – produit un effet immédiatement émouvant. Car cet aspect-là de la vie des héroïnes de Claws se construit comme une récréation enfantine et surtout un espace protégé.
En cheffe de clan volontaire, protectrice et néanmoins maltraitée par son petit ami malfrat, Desna incarne le basculement possible vers une forme de violence et de tension qui prend peu à peu beaucoup de place dans l’épisode initial.
Embringuée dans une relation sexuellement plutôt satisfaisante, mais moralement et affectivement douteuse avec un abruti bodybuildé sexiste qui essaie de faire de l’argent sur son dos – le salon de manucure sert à blanchir des dollars –, elle se retrouve bientôt dans une situation impossible dont la première saison devrait nous apprendre comment elle va en sortir.
Cette facette de Claws n’est pas inutile a priori. Elle en dit même potentiellement beaucoup sur la manière dont les opprimés quels qu’ils soient sont poussés dans leurs retranchements et forcés de réagir. Mais l’intrusion du polar se fait ici de manière un peu trop volontaire, au point que les interactions entre femmes qui devraient faire le sel de la série (on pense notamment à l’ombre bienveillante d’Orange Is the New Black) changent immédiatement de tonalité. Comme si, pour satisfaire les exigences d’un public (imaginaire ?) porté vers les intrigues resserrées et brutales, il ne fallait surtout pas sortir des clous trop longtemps.
Claws sur TNT (Turner Network Television)
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