L’ancien showrunner de « Lost » Carlton Cuse se relance avec « Bates Motel », un prequel de « Psychose » plutôt réussi. Entretien avec un pilier des séries à Hollywood.
Quand j’ai su qu’un prequel de Psychose était envisagé, j’ai cru à un canular. Vous n’avez pas craint de vous attaquer à ce monument ?
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Carlton Cuse – Notre idée était de rester à distance de la grande ombre de Hitch. Au-delà du fait que Psychose est un très grand film, il n’y avait aucun intérêt à le revisiter, car cette histoire a déjà été racontée. Ce qui nous a inspirés, avec ma co-scénariste Kerry Ehrin, c’était l’idée de reprendre le personnage mythique de Norman Bates à zéro. Quant à Norma, il s’agit de l’une des figures les plus célèbres du cinéma mais personne ne la connaît. Ceux qui ont vu le film me comprendront. La créer de toutes pièces était une opportunité extraordinaire.
Le couple formé par Norma et son fils adolescent est au coeur de Bates Motel.
Oui, ils forment quasiment un couple romantique venu du cinéma classique des années 50. Même s’ils vivent en 2013, ils regardent de vieux films ensemble, leur maison et le motel semblent hors du temps. Leur relation représente toute leur vie mais ce n’est pas forcément sain. Norma fait tout pour empêcher son fils de devenir qui il est vraiment, un psychopathe. Pourtant, d’une certaine manière, elle catalyse ses pulsions.
Comment définir la série ? Est-ce un thriller psychologique ? Un drame adolescent ?
Plusieurs choses mélangées. Dans le système de la télévision américaine, nous sommes programmés pour travailler à plusieurs et partager notre ADN avec d’autres. Kerry Ehrin était chef d’écriture sur Friday Night Lights, une série nuancée, intime et magnifique. Moi, je viens de Lost, qui concentrait plusieurs genres, entre l’aventure, la science-fiction et le drame classique. J’ai l’impression que Bates Motel est un amalgame de nos savoirs. Le premier show que j’ai créé était Brisco County (1993-94 – ndlr), un western croisé avec de la sci-fi… J’aime les séries hybrides. A mes yeux, les genres ne se suffisent jamais à eux-mêmes. S’il fallait vraiment choisir, je dirais que nous voyons Bates Motel comme une tragédie, mais ce n’est pas comme ça qu’on a vendu la série à la chaîne !
Vous citez Twin Peaks comme une influence majeure. Pour quelle raison ?
En effet, Twin Peaks a été notre plus grande influence. En tant que créateur, je sais que l’on construit toujours à partir du travail des autres. Il y a pire comme modèle, Twin Peaks a changé beaucoup de choses à la télévision. La série s’est terminée après une trentaine d’épisodes et il y en avait beaucoup plus à faire, je pense. Je trouve fascinante l’idée d’arpenter une ville et de déterrer ce qui se passe sous la surface. J’espère que Bates Motel retient cette leçon.
Etes-vous toujours marqué par les polémiques qui ont émaillé la fin de Lost, il y a trois ans, quand certains fans ont exprimé leur insatisfaction ? Damon Lindelof, qui dirigeait la série avec vous, est revenu sur cet épisode récemment.
Damon et moi sommes toujours très proches, mais nous sommes aussi différents. Je suis peut-être moins touché que lui par ce qui s’est passé… En tout cas, je suis tout aussi fier de la fin de Lost. C’était une réflexion sur le mystère de la vie. La vie n’apporte pas de réponses et nous n’en avons pas donné. Tout le monde n’allait pas aimer ça ! Lost a été une aventure folle. On était influencés par Twin Peaks et Le Prisonnier… La série est arrivée pendant l’essor des réseaux sociaux, avant de devenir un phénomène. C’était un chapitre important dans ma vie mais je n’ai pas peur de la suite. Je travaille en ce moment au pilote d’une nouvelle série, The Strain, réalisé par Guillermo Del Toro. Je développe aussi l’adaptation américaine des Revenants, que j’adore !
Bates Motel le vendredi, 22 h 15, 13ème Rue
{"type":"Banniere-Basse"}