Alors que tous les regards sont tournés vers la bataille que se livrent “House of The Dragon” et “Les Anneaux de pouvoir”– et, à travers elle, la guerre des audiences qui occupe HBO d’un côté, et Amazon de l’autre – c’est au tour de Disney+ de dégainer sa série blockbuster de la rentrée.
Après les sorties du Livre de Bobba Fett en début d’année, et d’Obi-Wan Kenobi ce printemps, la firme aux grandes oreilles nous habitue à la cadence désormais (trop) soutenue d’une nouvelle série estampillée Star Wars par trimestre, et continue son entreprise d’essorage de franchise, investissant la moindre zone d’ombre de la saga, au risque de soustraire encore un peu de magie au mythe, déjà largement amoindri par des spin-off en pagaille.
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Mieux, en centrant sa nouvelle série sur Cassian Andor, personnage apparu dans Rogue One (2016), Disney réalise la prouesse de tirer une série dérivée d’un film lui-même annexe à la saga. Série dérivée d’un film dérivé, le vaisseau Star Wars serait-il à la dérive ?
Située chronologiquement quelques années avant Rogue One, en cette période trouble où l’Empire contrôle la galaxie d’une poigne de fer et où la rébellion n’en est qu’à un stade embryonnaire, Andor suit l’itinéraire insurrectionnel de Cassian Andor (joué par Diego Luna). Esprit séditieux, hostile à l’Empire et à ses nombreux faisceaux, Cassian est né dans les décombres d’une planète déshéritée de la bordure extérieure, abandonnée suite à un grave accident minier, avant d’élire domicile sur Ferrix, une planète ouvrière tenue par une corporation orwelienne à la solde de l’Empire. C’est dans les artères fumantes de cette planète industrielle, où les ouvrier·ères sont fiché·es et surveillé·es de près par des sbires de l’Empire, que commencera l’insurrection de Cassian, rebelle dans l’âme qui le deviendra dans les faits.
Si on partait, sinon défaitiste, du moins méfiant, les trois premiers épisodes d’Andor nous ont positivement surpris. D’abord parce qu’ils régénèrent le ton sombre et préoccupé qui faisait la force de Rogue One – spin-off étonnant qui remodelait intelligemment les codes de la franchise – ; ensuite parce qu’ils explorent un versant de l’univers Star Wars approché de façon parcellaire. En investissant une région satellitaire de l’Empire, loin des hautes sphères qui décident du sort de la Galaxie, Andor donne la voix aux laissé·es pour compte : ouvrier·ères besogneux·euses cultivant une haine rentrée pour l’Empire, ou petits kapos de province assujettis à son autorité, recrachant les discours fascisants de leurs despotes par une forme d’allégeance teintée de peur.
Dimension politique et réalisme charbonneux
Loin des héros·ïnes prédestiné·es qui peuplent ordinairement la saga – détenteur·trices de pouvoirs mystérieux ou héritier·ières insoupçonné·es de lignages favorables – Cassian Andor ne pourra compter que sur son insoumission, et sa défiance à l’ordre établi pour prendre part à l’histoire tumultueuse de la Galaxie, mise à mal par un Empire laissé hors-champ, mais dont les radiations maléfiques infestent chaque plan.
Ancrée dans un réalisme charbonneux, plus aride dans le ton comme dans la forme, Andor évite aussi l’écueil habituel d’un fan-service invasif et servile, pour se concentrer sur son récit tendu et sans fioritures, servi par une mise en scène efficace qui emprunte ses codes aux films d’espionnage. Mieux, la série créée par Tony Gilroy (déjà co-scénariste sur Rogue One) renoue brillamment avec la dimension politique qui a toujours irrigué avec un degré de subtilité variable, la saga de George Lucas. Et si on tenait enfin la série Star Wars capable de rétablir l’équilibre dans la Force ?
Andor de Tony Gilroy sur Disney+
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