En mettant à l’honneur le genre du slasher, la neuvième saison d’ »American Horror Story » se livre à un exercice de style plaisant mais pour l’instant trop calibré. (Spoilers)
Cet article comporte des révélations sur la série American Horror Story.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Depuis presque dix ans, la série d’anthologie de Ryan Murphy et Brad Falchuk soumet chaque saison un sous-genre de l’horreur à la moulinette stylistique et aux obsessions de ses créateurs. De la maison hantée à l’hôpital psychiatrique et de la confrérie de sorcières au freak show, le cauchemar y progresse comme une monstrueuse parade dont le rythme syncopé s’ébroue en éclats gores, queers et baroques.
Habités par une troupe d’acteurs transitant d’un rôle à l’autre au fil des récits, les premiers chapitres d’American Horror Story avaient contribué au retour en grâce de l’horreur à la télévision, avant que le show ne s’enlise dans des propositions moins convaincantes. Sans être entièrement réussies, ses trois dernières saisons avaient un peu relancé la machine en adoptant une tonalité plus politique. À rebours de cet élan, la saison 9, sous-titrée 1984, s’écrit dans le rétroviseur pour mettre à l’honneur le slasher.
Back to 1984 (avec ceinture de sécurité)
Un soir d’été 1970, les vacances des pensionnaires du camp Redwood sont abrégées dans le sang par l’irruption de M. Jingle, un tueur psychopathe qui assassine neuf adolescents dans leur dortoir avant d’être appréhendé par la police. Quatorze ans plus tard, alors qu’un groupe de jeunes moniteurs participe à la réouverture du camp, M. Jingle s’évade de prison…
À l’image de cet argument calibré, le premier épisode de cette nouvelle saison avance en terrain balisé, surfant sur la tendance généralisée à la nostalgie 80’s : des tenues colorées aux cours d’aérobic et des émissions vintages aux baladeurs cassettes, aucun signe caractéristique de l’époque (du moins telle qu’elle s’est sédimentée dans l’imaginaire contemporain) ne manque à l’appel.
Cette absence de prise de risque trouve son prolongement dans le respect pour le moment scrupuleux des codes d’un sous-genre de l’horreur qui a connu ses plus belles heures dans les années 80, à la faveur de franchises comme Halloween ou Vendredi 13, avant de s’offrir des variations ironiques ou méta à la fin des années 90 (notamment dans la saga Scream). Dans la plupart des slashers, des jeunes gens sont pourchassés par un tueur qui les charcute un par un à l’arme blanche, jusqu’à ce que sa dernière proie lui échappe et mette fin au cauchemar.
Un slasher en série sans originalité
Si cette structure narrative pouvait trouver dans la forme épisodique un écrin privilégié, en regard notamment à sa pulsation meurtrière (une victime par semaine, égrenées comme un décompte avant la révélation finale de l’identité du tueur) et sa relance perpétuelle du suspense, force est de constater que peu de séries ont embrassé le slasher de façon inventive. Ryan Murphy et Brad Falchuk s’y étaient d’ailleurs frottés dans la pénible Scream Queens, pudding kitsch enlisé dans un second degré permanent.
Leur travail s’annonce ici plus appliqué, comme une compilation maniériste de gestes et de cris ancrés la mémoire collective : une baignade en eaux troubles, le hurlement d’une victime sans défense ou l’éclat torve de la lame d’un couteau qui s’abat puis se redresse dans une ivresse meurtrière. On peine hélas à y retrouver ce qui constitue la singularité d’American Horror Story, ses outrances et ses extravagances, sa cruauté bouffonne et sa perversité trouble. Ses visages les plus mémorables, Evan Peters, Sarah Paulson et Jessica Lange, ne sont d’ailleurs pas de la partie.
Quelques pistes, toutefois, nous suggèrent d’honorer le rendez-vous du deuxième épisode, pour voir : d’abord l’homonymie du titre et du roman dystopique de George Orwell, trop saillante pour être innocente, et puis cette présence insistante des écrans, couplée à l’artificialité des clichés alignés : ce qui se présente comme un énième slasher ne va-t-il pas se retourner comme un gant pour révéler une mise en abîme plus retorse que prévu ?
American Horror Story : 1984, tous les vendredis sur Canal + Séries.
{"type":"Banniere-Basse"}