De retour d’une mission sur l’ISS, une astronaute commence à douter de la réalité qui l’entoure. Joignant la science-fiction au thriller paranoïaque, “Constellation” s’enlise dans une intrigue à la symbolique grossière et aux concepts scientifiques mal digérés.
Tout commence par une voiture qui file dans la nuit. Une mère et sa fille, manifestement en fuite, fendent le blizzard tandis que la radio diffuse un appel de détresse en russe.
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Un raccord suffit à nous projeter dans l’ISS. Jo (Noomi Rapace), astronaute talentueuse, parle en visio avec sa fille Alice lorsque quelque chose heurte la station et tue un membre d’équipage. Bloquée dans l’espace, elle devra déployer des trésors d’ingéniosité pour revenir sur Terre.
Deux épisodes plus tard, le remake haletant de Gravity cède la place à un thriller psychologique teinté de paranoïa : de nouveau parmi les siens, Jo remarque des variations subtiles dans son environnement, subit d’inquiétantes visions et se met à douter de ses propres souvenirs. L’espace a-t-il modifié sa psyché, ou est-elle victime d’une conspiration ?
Un thriller psychologique sur fond de conquête spatiale
On l’aura compris, Constellation cherche à nous perdre en multipliant les fausses pistes et en éprouvant les contours de la réalité dans laquelle elle s’inscrit. Nouvelle pierre dans le corpus de science-fiction bâti par la plateforme Apple TV+ (après For All Mankind, Foundation, Invasion ou Silo), la série cherche son point d’équilibre entre plusieurs genres et emboîte les registres comme un puzzle mental qui place le spectateur dans un état de trouble proche de celui de son personnage.
Partant du postulat qu’un séjour prolongé dans l’espace pourrait altérer certaines facultés humaines, Constellation déploie son intrigue dans les zones d’ombre et les angles morts de la conquête spatiale, puise dans ses échecs tragiques et surfe sur les théories du complot qu’elle n’a cessé d’alimenter. En creux, il est autant question de ce que la fiction fait de la science que de la façon dont la science pourrait remodeler la fiction.
La physique quantique pour les nuls
C’est sur ce point que le bât blesse (et qu’on déposera un avertissement pour spoilers).
Au moment de l’accident se tenait dans l’ISS une expérience dénommée CAL, visant à observer une superposition quantique de la matière. Pour résumer grossièrement, la mécanique quantique affirme entre autres qu’une particule microscopique peut exister dans plusieurs états à la fois, et que l’observateur influe sur la qualité du système observé. Cette révolution épistémologique est devenue une des tartes à la crème de la science-fiction contemporaine, ouvrant un champ infini de réalités parallèles dont les multivers super-héroïques seraient la matérialisation la plus grossière.
Si ces principes auraient pu donner lieu à de belles expérimentations narratives et formelle (un split-screen comme effet de montage quantique ? Une image dépendant du·de la spectateur·rice qui la regarde ?), les architectes de la série s’enlisent dans un mystère à la symbolique insistante, disposant des indices trop visibles qui en évacuent le trouble sans en dissiper la confusion. Alourdie par le jeu figé de ses interprètes secondaires et une mise en scène générique, Constellations traîne cruellement en longueur et finit par nous lasser. Il aurait fallu une vision plus fine et une main plus légère pour saisir la part de croyance (et peut-être de folie) que présuppose et suscite l’aventure vertigineuse de la conquête spatiale.
Constellation, de Peter Harness, avec Noomi Rapace, Jonathan Banks, James D’Arcy… Disponible sur Apple TV+.
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