Pour sa deuxième collection haute couture dans la maison créée par Cristobal Balenciaga en 1919, Gvasalia continue ses jeux de déconstructions vestimentaires, alimentés de références à la pop culture et à l’univers numérique.
Robe fourreau noire en latex, cheveux blonds platines plaqués, Kim Kardashian prend des airs d’héroïne de space opera rétro alors qu’elle foule pour la première fois un podium parisien. Bienvenue dans la 51e collection haute couture de la maison Balenciaga, par Gvasalia. Affolant les réseaux sociaux et éveillant les cris des fans réuni·es à l’extérieur, le show réunissait une nuée de stars issues de tous les univers. La chanteuse Dua Lipa en mini-robe drapée de taffetas, l’actrice oscarisée Nicole Kidman en fourreau métallique ou encore le joueur de football français Eduardo Camavinga vêtu d’une longue veste de tailleur ébène.
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Après des collaborations avec Isabelle Huppert, Aya Nakamura, Elliott Page ou les ex-Mr. et Ms. West, Gvasalia poursuit sa fable sur la culture de la célébrité contemporaine, ainsi que sur son intégration croissante dans le monde de la mode, permettant de faire le lien avec le grand public. Il transforme ici son défilé en spectacle, et insère ces référents mainstream dans le décor du salon de couture historique de la maison, rénové sur le modèle de 1968. À cette date, le 10 avenue Georges V fermait ses portes alors que Cristóbal Balenciaga refusait de prendre en compte le tournant prêt-à-porter, et ainsi nouer le dialogue avec les aspirations de la nouvelle génération. 54 ans plus tard, Gvasalia aurait-il finalement trouvé un moyen de faire le lien entre la haute couture et le grand public ?
Humanoïdes couture
Après avoir vêtu ses mannequins de cagoules noires en latex façon SM lors de son défilé à New York en juin, dans la première partie de ce show-ci, le casting est anonymisé par des visières en polyuréthane. Lignes arrondies, ces parois reflétant la lumière rappellent les formes des casques de réalité virtuelle – déjà utilisé par Balenciaga lors du printemps 2020. Coïncidences ? La maison figure parmi les premières qui habilleront nos avatars sur Meta (anciennement Facebook). Soit le futur de la démocratisation de la mode dans le monde virtuel.
Dans la première partie du défilé, technologies et artisanat s’associent pour relire un vestiaire du quotidien selon les codes de la couture. Une garde robe qui a fait la renommée de Gvasalia depuis ses débuts chez Vetements en 2013. Bombers gonflés à l’hélium, Denim japonais doublés de satin, t-shirts déformés avec de l’aluminium et parkas couture habillent les mannequins masqué·es. Muni·es de sacs enceintes imaginés avec Bang & Olufsen et vêtu·es de combinaisons néoprènes, les modèles incarnent une haute couture qui raconte l’anticipation du futur. “Il s’agit d’aller du futur vers le passé”, confirmait Gvasalia en coulisses à propos de l’arc narratif du show.
Couture populaire
Pour la seconde partie du défilé, les célébrités (sans masque) arborent de larges crinolines et des traînes fluides et drapées. Par leurs lignes hypertrophiées et leur aspect flottant, les tenues semblent dessinées elles aussi pour les métavers, et instaurent un dialogue entre passé et futur. Ici les idoles contemporaines en fourreau couture font le lien entre présent et passé, couture et mainstream.
Le salon de couture historique se transforme lui aussi. Quelques jours avant le défilé, Balenciaga annonçait l’ouverture d’une boutique dédiée à des pièces de prestige en éditions limitées. Désormais, au 10 de l’avenue Georges V, on peut acheter des pièces recyclées, figurines souvenirs en porcelaine et sacs haut-parleurs. “La raison pour laquelle je veux faire de la couture en 2021 n’est pas de plaire à ces clients que l’on peut compter sur les deux mains. C’est vraiment de créer cette nouvelle conversation avec un nouveau public, avant tout, qui m’intéresse”, expliquait Gvasalia au magazine W en juillet 2021. Pari réussi.
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