Prolifique et mystérieux, ce producteur anglais ne se dévoile qu’à travers ses morceaux joueurs et entêtants. Critique et écoute.
Acôté de lui, son collègue Burial passerait presque pour un émule exhibo de Robbie Williams ou un lofteur en manque de notoriété. Zomby, qui lorsqu’il sort se dissimule sous un masque de joker satanique, a réussi en plus de cinq ans d’activité intensive à ne rien montrer d’autre que ses morceaux. On ne connaît pas plus son visage que sa véritable identité, mais on sait en revanche que ce jeune stakhanoviste a déjà expurgé son cerveau en surchauffe de plusieurs centaines de titres, dispersés sur des maxis, souvent simplement sur YouTube ou, beaucoup plus rarement, dans le circuit classique de la filière musicale.
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Son premier album de 2008, Where Were U in ’92?, était pourtant limpide sur ses intentions de rembourser d’une traite les pionniers de la rave culture – un titre était explicitement baptisé Daft Punk Rave – et de les entraîner dans les couloirs du temps à la rencontre de leurs enfants du grime et du dubstep. Après une période de retrait volontaire pour accompagner son père mourant, dont l’agonie aura sans doute influé sur la partie la plus sombre de Dedication, Zomby revient chez les vivants en signant chez 4AD mais sans rien concéder d’autre à la lumière – les dirigeants du label ne connaissent paraît-il pas plus que d’autres son visage.
Moins marqués dubstep que ses dernières productions, les seize morceaux rassemblés ici oscillent entre spleen narcotique et euphorie tribale, effleurant un tas de genres – du r’n’b sans gourmette, livide et dépressif, à la drum’n’bass sans volonté guerrière –, mais évitent méticuleusement de s’alanguir quelque part. OEuvrant à des rapprochements audacieux, Zomby invite même Panda Bear à poser son empreinte vocale de Beach Boy hors sec sur Things Fall apart. Vortex évoque à l’autre bout du spectre les synthés acrimonieux de Suicide et Basquiat les réflexions au piano de Brian Eno. Quant à l’entêtant Natalia’s Song, on ne s’étonnerait pas qu’il finisse en générique d’un jeu vidéo en réalité augmentée dont Dedication pourrait au besoin fournir toute la bande-son.
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