Billy Corgan ne s’est jamais remis de la séparation de son groupe.
Même s’il en était l’emblème incontesté, même s’il n’en faisait qu’à sa tête, même s’il s’était octroyé le droit de virer les gens (le batteur Jimmy Chamberlin), même si les bassistes étaient interchangeables (D’Arcy, Melissa Auf der Maur), les Smashing Pumpkins étaient un groupe, son groupe. Et sans lui, Corgan semblait perdu.
La preuve avec Zwan, son projet initié en 2001 avec David Pajo, qui suivit la séparation des Pumpkins et donna le jour à un album sans succès. Zwan vite sabordé, Corgan sortit un album solo brouillon et peu inspiré en 2005, qui entraîna un peu plus le chanteur dans le no man’s land des has-been du rock, lieu pas très cosy d’où l’on peut très bien voir les jeunes générations prendre sa place. Pas surprenant donc que Corgan relance les Smashing Pumpkins, même si seul Jimmy Chamberlin (déjà de retour dans Zwan) a été réintégré.
Ce sixième album possède, outre le nom du groupe, plusieurs atouts pour que Corgan reprenne le dessus. Chamberlin d’abord, ossature indispensable et brute, qui donne toute sa férocité à Zeitgeist. Une certaine ambition ensuite. Loin du prog-rock sombre et mou de Machina et de l’intimité radieuse d’Adore, Zeitgeist renoue avec l’agressivité psychédélique des premiers albums, avec leur ampleur et leur complexité. Il emprunte au heavy-metal (Doomsday Clock, United States…), superpose les couches de guitares, diffuse quelques gimmicks pop et new-wave et sait aussi ménager quelques plages plus tendres.
Au milieu de ce déchaînement de sons et d’idées, il manque à Zeitgeist un ou deux morceaux fédérateurs qui lui donneraient une plus grande cohérence et feraient de ce retour un véritable événement. Mais Zeitgeist et la tournée qui accompagne sa sortie montrent que le groupe est bien parti pour remettre de l’ordre dans un monde édulcoré par Fall Out Boy ou My Chemical Romance.