Voilà un premier album qui aura su se faire attendre, désirer. Alors que tous ses camarades de classe remplissaient l’espace médiatique avec leurs efforts les plus nourris, Alex Gopher restait paisiblement dans l’ombre à préparer sa propre offensive. Vendeur dans le Superdiscount d’Etienne de Crécy, autrefois membre d’Orange ce faux groupe culte fréquenté par […]
Voilà un premier album qui aura su se faire attendre, désirer. Alors que tous ses camarades de classe remplissaient l’espace médiatique avec leurs efforts les plus nourris, Alex Gopher restait paisiblement dans l’ombre à préparer sa propre offensive. Vendeur dans le Superdiscount d’Etienne de Crécy, autrefois membre d’Orange ce faux groupe culte fréquenté par Air ou Bang Bang , l’intéressé n’a rien d’un cancre, du bon dernier à qui on offre sa chance après que le peloton est passé avec des longueurs d’avance. Ses premiers maxis notamment un Gordini mix d’heureuse mémoire l’ont placé parmi les meilleurs, très à l’aise dès qu’il s’agit de remodeler la house, lui faire rencontrer de la fantaisie, de l’air frais préservé de l’haleine fétide des puristes. A côté de ces brillants états de service, Gopher s’est fait quand même assez discret avant ce You my baby & I longtemps fantasmé, même si son nom en tant qu’ingénieur de son a orné pas mal de pochettes. Et dans son cas, discrétion rime sans doute avec décontraction : Gopher donne surtout l’impression de s’être fait plaisir avant tout, sans penser à ce que l’on attendait de lui. Même si la sortie de cet album a longtemps été retardée pour obéir à une invasion programmée du monde libre, son contenu ce funk entre deux âges paraît paradoxalement tout sauf présomptueux, ne nourrissant aucune ambition démesurée.
Ainsi, il ne faudra pas s’attendre à éprouver un choc : ici, l’innovation passe après quelque chose de plus direct et insidieux. Au lieu de s’habiller en révolutionnaire, Gopher, armé de son impressionnante patte sonore, s’ingénie à ne voir dans la musique qu’une source de plaisirs directs.
Et ne se refuse rien et surtout pas, quitte à se faire vampiriser par son invité, à convier Michael « Clip » Payne de la clique Funkadelic. Time et Party people sonnent ainsi comme des hommages aux funks déraillés de George Clinton, du P-funk subtilement replacé dans notre époque, irrésistibles sauts dans le temps qui ne gêneront que les esprits chagrins et les archivistes, penauds devant ces anomalies temporelles. Dans le même genre, The Child, avec l’emprunt de la voix de Billie Holiday, pourrait passer pour une honteuse violation de sépulture. Mais Gopher met en oeuvre tant de subtilité pour changer de contexte ce diamant brut que la diva amochée finit par se sentir bien dans cette soul transgénérationnelle. Les morceaux les plus réussis sont néanmoins les plus personnels, les moins référencés, comme ce You my baby & I, aérien et gracile, ou Consolidated. Au final, opérant ainsi un joyeux compromis entre le salon et le dance-floor, ce disque vise à la fois la fête et la tête, la relaxation (Ralph and Kathy ou Quiet storm) et la sueur (Tryin’). L’apprivoiser, rendre son écoute intime et quotidienne n’est plus qu’une question de temps et de bonnes soirées en perspective.
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