Après quatre années de troubles, le Canadien sort un album onirique et épuré qui nous emporte avec lui.
A priori, Wave a tout de ces disques sombres, désenchantés, de ces recueils où l’auteur-compositeur construit de grands édifices pop sur des petites miettes d’existence. Patrick Watson, lui, refuse de considérer son sixième album comme une œuvre triste, plombée par la mélancolie d’une vie confrontée aux pires drames ces dernières années : la perte de sa mère, la séparation d’avec sa compagne, le départ de Robbie Kuster, batteur et complice de longue date.
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“C’est sûr que si on résume Wave à Broken ou Look at You, on peut se dire qu’il s’agit d’un disque assez lugubre. Or, je l’ai enregistré selon plusieurs états d’esprit, et cela se reflète dans certains morceaux : Wild Flower, par exemple, a été écrit au cours d’une période agréable, tandis que Turn Out the Lights est une façon de réapprendre à communiquer avec quelqu’un. C’est plutôt positif ça, non ?” Une fois la question posée, Patrick Watson se marre, et c’est communicatif.
Capter des instants à fleur de peau
Après tout, quoi de plus logique de la part d’un artiste qui se dit constamment à la recherche d’émotions, au service de ses sensations, de ses sentiments. Loin des modes et des tendances, Patrick Watson donne en effet l’impression de composer selon les vibrations de son corps. Parfois, une voix et un piano suffisent à panser les plaies. D’autres fois, les intentions se veulent plus orchestrales, mais l’idée reste la même : capter un instant, mettre en son des “chansons très fortes, moins complexes que par le passé et qui durent longtemps”, composer des mélodies capables d’accompagner un amour (naissant ou endeuillé). En 2015, le Canadien avait également composé la BO d’un film de Wim Wenders, et son titre (Everything Will Be Fine) semble encore lui servir de mantra aujourd’hui.
“Tous les événements traversés ces dernières années m’ont appris qu’il faut parfois accepter une période douloureuse, ne pas la refouler, y faire front en attendant que les beaux jours reviennent. Un peu comme ces vagues qui s’abattent sur vous dans l’océan : c’est inutile et dangereux de se débattre contre elles, il vaut mieux se laisser aller et attendre.”
On comprend alors pourquoi ce nouvel album s’intitule Wave : il s’agit davantage d’une métaphore de tous ces aléas de la vie qui peuvent nous submerger à tout moment qu’une déclaration d’amour à la nature, comme pourraient le suggérer également certains titres (Wild Flower, Strange Rain, Here Comes the River).
Une forme suprême d’élégance
Il y a pourtant quelque chose d’extrêmement pur dans la musique de Patrick Watson. Pour parler de Wave, le Canadien emploie d’ailleurs le terme de “paysage musical”, et c’est vrai qu’il y a de ça lorsqu’on l’entend explorer sur son piano les mille et un frémissements d’un homme fragilisé par le destin, désormais en quête de quiétude, soumis à son sentimentalisme et bien incapable de contenir son émotivité à fleur de peau.
Pas pour rien, finalement, si ses morceaux illustrent bien souvent les scènes les plus dramatiques des séries télévisées (et notamment This Is Us) qui viennent piocher dans son répertoire une forme suprême d’élégance, un cadre soyeux d’où émergent mille images, mille ressentis.
Wave (Domino/A + LSO/Sony Music)
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