“Le bien-être égoïste, la propriété privée, le salaire, la recette nette, le fric, la prime, le gain ! Nous nous cognerons contre ce mur dès la première chaumière !… Par toute la Russie, on entendra hurler, grincer, gémir ! Des meutes de possédés se rueront, la bave aux lèvres, pour la possession d’un poulet famélique.” […]
« Le bien-être égoïste, la propriété privée, le salaire, la recette nette, le fric, la prime, le gain ! Nous nous cognerons contre ce mur dès la première chaumière !… Par toute la Russie, on entendra hurler, grincer, gémir ! Des meutes de possédés se rueront, la bave aux lèvres, pour la possession d’un poulet famélique. » Ces paroles ne sont pas extraites d’un reportage sur la Russie d’aujourd’hui. Nous sommes en 1918, les marins ont porté au pouvoir les bolcheviques mais, l’esprit libre, ils restent réfractaires à toute autorité. C’est une femme que l’on envoie dans ces garnisons pour mettre de l’ordre dans tout ça et creuser les fondations de ce qui deviendra l’Armée rouge. La commissaire débarque dans un univers où l’on pisse dru, on se bat musclé avec un sens de l’honneur qui vous amène vite à l’état de cadavre. Sans rajouter le moindre poil aux pattes ou aux joues, femme jusqu’au bout des ongles, elle saura immédiatement se faire respecter en dégommant le premier matelot qui l’approche de trop près. Il fallait du cran à Bernard Sobel, metteur en scène et directeur du Théâtre de Gennevilliers, pour, en pleine sortie du Livre noir du communisme, mettre en scène Vichnievski. Un auteur russe qui n’est même pas un martyr, confortablement nommé en 1946 secrétaire de l’Union des écrivains soviétiques. C’est en 1932 qu’il a écrit cette tragédie voulue « optimiste », un texte où se confrontent toutes les pensées politiques et philosophiques, où il est encore possible de choisir sa version « du bien de l’humanité » et qui se termine en joli massacre. Bernard Sobel fait jouer la tragédie dans un décor plus proche de Gotham City que du Cuirassé Potemkine Batman aurait-il infiltré les murs du Théâtre de Gennevilliers ? Disons plutôt que son directeur préfère mettre les mains dans le cambouis de l’idéologie, quitte à faire un peu vieux jeu et tenter un théâtre politique. « Révolte, rébellion, ou révolution, d’ordre public ou privé, parcourent comme un fil rouge le répertoire de ce théâtre. Fil rouge aussi, le travail de deuil au sujet des utopies qui engendrent les révolutions ou qui en découlent. »
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La Tragédie optimiste de Vsevolod Vichnievski mise en scène Bernard Sobel
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