Le hip-hop authentique de VIC MENSA, Mark E. Smith dément avec THE FALL, le « Orc » épique de OH SEES, un projet instrumental de MOGWAI, la beauté sidérante des CYMBALS et MARIETTA en solitaire.
Avec The Autobiography, son premier album, le dénommé Vic Mensa dit avoir voulu être absolument authentique. Sur Wings, il se présente comme Victor, celui qu’on ne croiserait jamais dans les pages de la bible du hip-hop US, le magazine XXL. Comme pour mieux rappeler que tout ce qui sera dit ici relève de la vérité la plus intime. A 24 ans à peine, le kid de Chicago se livre comme Chateaubriand dans Mémoires d’outre-tombe et claque un disque en forme de grande confession devant l’Eternel, où il est question de tromperies, d’addictions et de troubles mentaux. En filigrane, c’est surtout Fox News, le racisme et la violence de la société américaine que Mensa documente.
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Un peu comme The Fall, pour qui chaque album a valeur de document. C’est plus que jamais le cas ici avec New Facts Emerge, trente-deuxième album de la formation de Mark E. Smith (il y en a beaucoup plus, en vrai). Le Mancunien hurle qu’il est en quête de drame sur la controversée Victoria Train Station Massacre et clôture son disque avec Nine out of Ten, sur une boucle de guitare surf interminable complètement démente.
Un truc rarement entendu chez The Fall, qui fait écho au finish épique de Orc, dix-neuvième album studio de Oh Sees. Raw Optics, instrumental de plus de six minutes, consacre ainsi définitivement la formule à deux batteries instituée par John Dwyer et place l’expérimentation rythmique au rang de mantra, pour un groupe qui, à l’instar de The Fall, n’a jamais cherché à rester dans sa zone de confort.
Et il en va de même pour Mogwai. Le champ d’exploration sonore des Ecossais semble aussi vaste que l’univers, au point de voir dans chaque mouvement d’Every Country’s Sun, leur dernier album, une relecture contemporaine de 2001 : l’odyssée de l’espace, de Stanley Kubrick. Tous les titres sont instrumentaux, hormis le très pop Party in the Dark, et suscitent une forme de contemplation active tant l’alternance des nappes et des progressions diluviennes captive.
En parlant de progression captivante, les Londoniens de Cymbals sortent Light in Your Mind, un album de synth-pop dansant d’une beauté sidérante. Toute la délicatesse du songwriting de Jack Cleverly et Dan Simons éclate au grand jour sur le successeur de The Age of Fracture, un disque qui naviguait déjà entre post-punk minimaliste et modernité pop étincelante. Pour s’en convaincre, il suffit de se passer en boucle Fully Automated Luxury, véritable pépite groovy évoquant les errances synthétiques des Australiens de Parcels. La guitare funk en moins, mais le saxophone en plus.
Jack Cleverly maîtrise d’ailleurs très bien le français mais sûrement pas autant que Guillaume Marietta sur son deuxième album, La Passagère. Enregistré dans la langue de Molière à Los Angeles, aux côtés du discret mais incontournable Chris Cohen, il contient les belles surprises que Guillaume nous avait promises il y a quelques semaine autour d’une tisane pour venir succéder au très lo-fi et bricolo Basement Dreams Are the Bedroom Cream. Et quelles surprises ! Neuf chansons au charme suranné revendiqué, trouvant leurs racines aussi bien dans l’héritage de l’indie-rock fait maison que dans une tradition d’écriture bien française. Le plus saisissant restant cette présence ectoplasmique qui habite le disque telle une passagère clandestine, dont on ne saurait dire si elle est l’âme de l’auteur ou si elle émane d’une évocation plus lointaine.
Albums
The Autobiography de Vic Mensa (Roc Nation)
New Facts Emerge de The Fall (Cherry Red Records)
Orc de Oh Sees (Castle Face/Differ-ant)
Light in Your Mind de Cymbals (Tough Love/Differ-ant)
La Passagère de Marietta (Born Bad Records)
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