Son précédent album, Endless Summer (titré en hommage aux Beach Boys), était une excursion au cœur des machines, pleine de rebondissements et d’états d’âme passionnants. Sur Venice, Fennesz emploie les mêmes méthodes de composition : guitariste de formation, il construit ses morceaux à partir de mélodies, de sons, de bruits, de textures, joués ou élaborés […]
Son précédent album, Endless Summer (titré en hommage aux Beach Boys), était une excursion au cœur des machines, pleine de rebondissements et d’états d’âme passionnants. Sur Venice, Fennesz emploie les mêmes méthodes de composition : guitariste de formation, il construit ses morceaux à partir de mélodies, de sons, de bruits, de textures, joués ou élaborés à partir de son instrument de prédilection, puis manipulés à l’aide de logiciels et autres interfaces informatiques. Fennesz, contrairement aux autres artistes des labels Touch ou Mego (auxquels il est affilié depuis ses premiers disques, il y a environ dix ans), ne se laisse jamais aller vers les extrêmes. Sa musique, au fond, n’a rien d’expérimental : elle se joue tout en équilibres, entre une volonté de faire du bruit brut et une envie indéracinable d’encadrer ce bruit à l’intérieur de vignettes délicates.
Venice est ainsi un recueil de chansons abstraites, au sein desquelles on reconnaît parfois la tonalité ou les accords d’un instrument ou encore la chaleur d’une voix. Le disque semble avoir été conçu comme un journal de voyage, chacun de ses morceaux évoquant une atmosphère singulière, qui pourrait se rattacher à un lieu précis (Château Rouge, City of Light) ou encore à une chimère intime (The Other Face, The Point of It All). Au milieu du disque, sur l’élégant Transit, comme une césure marquant un changement de climat, David Sylvian chante un hymne sombre et maussade, qui évoque la cold-wave européenne des années 80. « Say your goodbyes to Europe« , murmure-t-il, comme pour souligner le fait que la musique irréductible et magnifique de majesté contenue, sur laquelle il égrène son chant, n’est rien moins que l’annonciation d’un futur déjà présent.