En mutant d’Orlando vers les Vanishing Twin, l’avant-gardiste Cathy Lucas met sur orbite un album au psychédélisme trouble.
Il est sans doute curieux d’éclore à travers un nom renvoyant à la mort embryonnaire : l’expression “vanishing twin” désigne la lyse d’un jumeau, soit le décès in utero du membre d’une fratrie jumelle. De sa propre gémellité orpheline, Cathy Lucas, multi-instrumentiste et chanteuse londonienne impliquée dans de nombreux projets artistiques (Innerspace Orchestra, Orlando, Fanfarlo…), a choisi de se rappeler à travers ce groupe formé en compagnie d’autres habitants de contrées étranges, toutes plus ou moins science-fictionnelles et tachées de glauque, du moins si l’on en juge par leurs noms : un incertain Man From Uranus, le bassiste japonais surnommé Zongamin (Susumu Mukai), Elliott Arndt aux flûtes et aux percussions, enfin la batteuse Valentina Magaletti, membre de Shit And Shine (!). Drôle de tribu, assemblée l’année dernière seulement, avec l’espoir de dérégler nos sens dans des transes magiciennes et une déglingue psyché toxique à souhait.
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Le trip démarre d’ailleurs avec un certain bonheur, sous la houlette de Malcolm Catto, le producteur des Heliocentrics. Batteries papillonnantes, basses monomaniaques, claviers échappés d’une astronomie dominée, chœurs éthérés et bruits de jungle en croissance, la stimulation est agréable, la perte de repères confiante. Et puis ça déraille plus durement, vire au noir, et l’on commence à se glacer les sangs en se rappelant ce fœtus désagrégé, disparu dans le néant ventral. C’est la grande réussite de ce disque jusqu’au-boutiste que d’être par instants méchant avec nos ébahissements et de filtrer savamment le rêve et le cauchemar, la quiétude et l’horreur, au point que l’on ne sache plus bien lequel de ces états est le plus doux et s’il est tout à fait sain d’en tirer ce plaisir, au demeurant intense.
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