Découverts sur les blogs américains en 2007, les New-Yorkais de Vampire Weekend signent un premier album éclatant, entre pop fourmillante et sonorités africaines.
A une époque, dire que l’on aimait l’album Graceland de Paul Simon était synonyme de fatwa irréversible. On vous accusait d’avoir porté des chemises à manches courtes chamarrées, d’ignobles pantalons en flanelle écrus et des mocassins à glands (sans chaussettes). Pire encore, on vous reprochait d’être ami avec Philippe Lavil ou Johnny Clegg et de vous commettre à peu de frais dans des soirées soukous peuplées de quinquagénaires dont la dernière visite dans un magasin de disques remontait au moins à 1986. Cette époque est heureusement révolue, grâce à quatre garçons plein d’avenir, new-yorkais et regroupés sous le nom de Vampire Weekend.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Tout a commencé pendant l’été 2007 : via les blogs américains, on découvrait un morceau fascinant, Cape Cod Kwassa Kwassa, dont l’intro tissait d’improbables liens entre une Côte Est des Etats-Unis tout droit sortie d’un roman de Francis Scott Fitzgerald et l’ambiance fantasmée des quartiers populaires de Soweto.
La première rencontre a lieu en octobre 2007, lors du premier concert parisien du groupe. On découvre quatre garçons effectivement encore un peu étudiants dans leur tête et dans leur look. Fraîchement diplômés de la prestigieuse fac new-yorkaise de Columbia, et fringués en duffle-coats et cabans gris, beiges ou bleu marine, les quatre déboulent avec des têtes de bons garçons proprets. “Vampire Weekend, au départ, c’est le titre d’un film que je voulais réaliser avec un ami, une histoire de vampires, comme son nom l’indique. Pour ce film, tous les quatre, nous avions enregistré quelques morceaux. Le film ne s’est jamais fait mais nous avons continué à jouer ensemble, avec des intentions assez précises : mélanger pop, new wave et musique africaine » explique Ezra Koenig, chanteur du groupe.
Le “mélange” est d’une efficacité redoutable. Leur disque ne cesse de tourner en boucle. Vampire Weekend, et la pochette est peut-être là pour renforcer cette idée, est un disque plein de lustre. Un album riche et éclatant que l’on comprendra comme la chronique d’une fin de vie adolescente dans les universités de la Ivy League. On y parle des vieilles histoires de la fac (Campus, Oxford Comma), de filles jolies qui font venir le soleil (Bryn), de copain à la tête un peu bizarroïde (One – Blake’s Got a New Face), de jeunes punks bien mis (A-Punk) – dont il faut absolument découvrir le clip sur YouTube.
Le disque est une série d’aventures attachantes et quotidiennes, toutes couchées sur papier par Ezra Koenig, et que l’on imagine racontées par une sorte d’Holden Caulfield de L’Attrape-Cœurs en plein dans les exams et les embrouilles de filles. C’est frais, c’est gai, c’est parfois un peu sombre mais jamais trop non plus (I Stand Corrected, chef-d’œuvre discret de l’album), et tenu en permanence par des mélodies évidentes qui font apparaître au grand jour l’immense talent de songwriting d’un groupe dont l’avenir s’annonce déjà radieux. Et qui nous emmène, avec ce premier album, bien au-delà de nos espérances et de nos petites écoutes honteuses de Paul Simon. Par contre, on oublie les chemises chamarrées, la flanelle et les mocassins à glands.
{"type":"Banniere-Basse"}