V.U.

On se souviendra longtemps de ce jour de 1985, où l’on planta, pour la première fois, l’aiguille dans le sillon de V.U., le quatrième album avorté du Velvet, retrouvé, miraculeusement, seize ans après la date supposée de son enregistrement. Les quelques pirates lépreux en circulation laissaient présager le pire. Le choc fut d’autant plus grand à l’écoute de ces dix morceaux prodigieusement restaurés, nettoyés, remasterisés, qui semblaient pour la plupart avoir été enregistrés la veille au soir. Datant pour deux d’entre elles de 1968 (Stephanie Says et Temptation Inside Your Heart, avec John Cale encore à bord), pour les huit autres de 1969, ces chansons, et quelques autres, devaient, a priori, constituer un album, le successeur de The Velvet Underground, prévu pour sortir fin 1969. Lou Reed, lorsqu’il embraya sur une carrière solo, piocha allègrement parmi ces morceaux abandonnés, et des versions plus ou moins glorieuses de I Can’t Stand It, Lisa Says ou du poisseux Ocean ont refait surface sur son premier album de 1972. Andy s Chest attendra, quant à lui, l’album Transformer pour bomber à nouveau le torse tandis que She s My Best Friend échouera sur Coney Island Baby.

            {"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
          

Loin d’un assemblage au rabais, V.U. tente au contraire de retrouver la construction dramatique si subtile des albums officiels du groupe, alternant rock’n’roll hypnotique et ballades létales, fausses pistes country rock (sur One of These Days, Lou essayait, paraît-il, d’imiter le falsetto de Hank Williams) et même une mini-comédie musicale dont Moe tenait la vedette (I’m Sticking with You). L’ironie du sort voudra que ce disque devienne, et de loin, l’album du Velvet qui s’est le mieux vendu à sa sortie.