Trop instruit pour ignorer l’importance du lieu, du point de ralliement, dans l’histoire du rock, le collectif Future Now a posé ses turbulents bagages dans une nouvelle salle parisienne, le Triptyque. Comme Factory Records animait sa Haçienda, Creation sa Living Room et la clique de Warhol sa Factory Trop conscients des brassages multigenres et multimédias […]
Trop instruit pour ignorer l’importance du lieu, du point de ralliement, dans l’histoire du rock, le collectif Future Now a posé ses turbulents bagages dans une nouvelle salle parisienne, le Triptyque. Comme Factory Records animait sa Haçienda, Creation sa Living Room et la clique de Warhol sa Factory Trop conscients des brassages multigenres et multimédias audacieux qui ont assuré l’immortalité de ces prestigieuses écuries, les activistes de Future Now ont voulu un label qui ressemble à leur discothèque, à leur vidéothèque : le bordel archivivant et agité de ceux qui, depuis qu’ils sont entrés en musique comme on entre en religion, ont refusé de renier leurs bagages, de solder leurs amours.
Si les façons de l’exprimer sont ici radicalement différentes dans cette compilation-manifeste, tous les groupes semblent pourtant hurler la même chose : que la musique est chose trop vitale pour la traiter à la légère, pour la remiser dans ce second degré et ce cynisme de ceux qui, n’ayant jamais su l’aimer, la condamnent aujourd’hui à l’humiliation. Tous jouissent de son présent, s’impatientent de connaître son futur, mais aucun n’en ignore le passé : du punk à la country, de la pop céleste des sixties au romantisme eighties, les flash-backs sont ici intimes, sensibles, jamais martelés avec cette frime de ceux qui achètent leur propre nostalgie chez les antiquaires. De tous ces genres, de toutes ces époques, filtrés avec méthode et passion, ils ont retenu des obligations mélodiques, mais aussi le devoir de ne pas faire ses devoirs sagement, de prendre ses libertés avec la grammaire, la syntaxe, les cours d’histoire et même la géographie. Dans une partouze qui n’affolera guère plus que quelques gardiens mourants de temples en péril, ils emmêlent ainsi sans calcul rock’n’roll primitif et électronique dissolue, pop délurée et groove sauvageon’
Dans ce réacteur où s’entrechoquent joyeusement ces atomes crochus, on retiendra tout. Mais aussi un remix d’une vieillerie intacte de Metal Boys toujours aussi dandy-trash, la pop flamboyante des Bishop Invaders, la house-pop fragile de Vegomatic, l’electro-garage-rock snob de Madame de C***, la new-wave voluptueuse d’Extra Extra!, le breakbeat-rock épileptique du Chilien Panico ou une reprise fiévreuse du vénérable River Deep Mountain High par Mainstream. C’est beau, la naissance d’une famille.