Dans un album en état de grâce, le duo Bowerbirds porte le songwriting américain à des altitudes vocales et mélodiques inouïes.
Depuis qu’il s’est juché sur les plus hautes cimes du songwriting américain, Andrew Bird doit composer avec une réalité qu’on imagine pesante à la longue : la majorité des critiques ne cessent de le comparer à un oiseau – une métaphore ultratéléphonée que son patronyme, sa voix ailée et ses mélodies en apesanteur ont, certes, favorisée.
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Phil Moore, le chanteur des Bowerbirds, va probablement connaître un destin similaire : son gracieux ramage lui vaudra non seulement d’être assimilé à un piaf, mais aussi d’être considéré comme un clone d’Andrew Bird. Il est vrai qu’à la première écoute d’Upper Air, la ressemblance avec le surdoué de Chicago est frappante et presque gênante : même lyrisme à fleur de gorge, même aptitude à sublimer des chansons sculptées dans un bois harmonique séculaire, même économie instrumentale mise au service d’une écriture déliée.
A la deuxième écoute, toutes ces réserves sont balayées. Car Phil Moore et sa partenaire Beth Tacular, entourés par quelques musiciens pleins de doigté, font vibrer une corde expressive qui n’appartient qu’à eux : une corde à la fois souple (les arrangements, tissés dans de nobles matières acoustiques) et tendue (les vocalises, filées sans retenue) sur laquelle peu de leurs contemporains osent tirer. Ennemis de cette banalité et de cette frilosité auxquelles trop de folkeux ont jugé bon de se conformer, les Bowerbirds ne reculent devant aucune conquête, repoussant par le seul pouvoir de l’interprétation les limites formelles d’un songwriting qui n’a jamais paru aussi ample et généreux. Sous leurs petits airs de rien, leurs refrains célèbrent la grandeur d’un art populaire dont le souffle n’a pas fini d’embraser les coeurs les plus ardents.
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