Paris sous le soleil, le 21, 22, 23 et 24 juillet 2006…
Que faire lorsque l’on est coincé à Paris, qu’une bonne partie de nos congénères ont déjà fuit la pollution et l’ennui pour caler leur petit bout de serviette en plein soleil sur une plage bondée ? Ce week-end de mi-juillet, placé sous le sacro-saint triptyque « bitume, chaleur et pollution », n’aurait pu être qu’une longue et dernière ligne droite, comme celle qui a conduit le peloton sur les Champs, dimanche, pour le finish d’un Tour de France sans drogue (sans âme ?)
Encore sous le coup (de boule) d’un Mondial au final cauchemardesque, ce n’est pas du coté du sport qu’on est allé chercher ce week end de quoi s’encanailler. Vendredi 21 juillet, direction Paris Plage, à la recherche d’un peu d’air frais. « Ceux-qui-sont-déjà-à-la-vraie-plage » rigolent doucement. Pas moi, car mon week end commence là.
Là, c’est rive gauche, devant la bibliothèque François Mitterrand, nouvelle portion de Paris Plage avec sa succession de péniche, d’ambiances musicales. Il y a encore quelques mois, ce quai n’était qu’un gigantesque chantier, aujourd’hui il est rutilant et les touristes se pavanent entre les bars à thèmes, la piscine honteusement chère et le nouveau pont Simone de Beauvoir aux formes « féminines ». Pour un peu, on se croirait dans une station balnéaire sur la Côte : l’illusion est presque parfaite et un tantinet agréable. Pourtant, qu’il est loin le temps où les après-midi Cake & Milk et Piratages nourrissaient ces mêmes quais d’ambiances autrement plus évolutives et intrigantes.
C’est donc au Parc André Citroën, dans le fin fond du 15e arrondissement, qu’on ira chercher, dés le lendemain, un peu de cet esprit perdu. Car depuis 2003, l’équation est sur toutes les lèvres : Piratages + Cake & Milk = festival Sous la Plage. C’est donc une foule de bobo trendy, de robes à bois et de tongs brésiliennes que l’on retrouve dans le courant de l’après midi au début du concert des mignonnes Pipettes. Déjà aperçu en première partie de The Go Team il y a quelques mois, le show de ces anglaises est un régal pour les yeux et les oreilles. Succédané des girls band sixties, The Pipettes jouent la carte rétro avec un entrain sans pareil : chœurs langoureux, refrains bondissants, esprit fleur bleu, sourires espiègles et malicieux. Your kissses are wasted on me, XTC ou l’inégalable Judy transforment peu à peu le futuriste parc André Citroën en salle de bal pour ribote régressive. Après ce court enchantement, le français Yuksek balancera une grosse electro-tech qui tâche : désolé, c’est pas vraiment l’heure pour ça.
Le lendemain, bingo, on remet ça ! Avec en point de mire le concert des new-yorkais de Battles à 20 heures, je sirote ma première bière devant 31 Knots qui sonne comme un croisement difforme entre les Liars et Pearl Jam. Avec plus d’une heure de retard, Battles, « supergroupe » formé par des ex-Helmet et Don Caballero, finit sa balance intensément longue. Chauffé par quelques collègues ayant vanté les mérites live de ces laborantins signés sur Warp, j’avoue être un peu déçu par la froideur de l’ensemble. Excellents musiciens, les Battles font parfois penser à un Tortoise sous amphétamines, avec un batteur qui aurait doublé les doses avant de monter sur scène. A-t-on besoin d’écouter Tortoise en 2006 ? Non.
Trop cérébral, trop finement calculé, Battles ne passera véritablement à l’assaut que sur quelques morceaux plus franchement sauvages et hypnotiques. Paradoxalement, c’est en laissant les machines reprendre le dessus que le groupe redeviendra plus humain, trouvant dans une série de samples répétitifs le déclic qui fera partir le public dans une danse païenne et désarticulée.
Paris Plage Sous la Plage Lundi arrive et après une journée de travail joyeusement raccourcie (la clim n’existe pas aux Inrocks, la bonne excuse), c’est à l’une des festivités de Paris Quartier d’Eté que l’on se rend sous une chaleur de plomb. Aujourd’hui, les Pascals, cette drôle de fanfare japonaise, s’est installée au Luxembourg, après avoir visité de nombreux autres parcs parisiens ces derniers jours. Mené par le vénérable Rocket Matsu, chef d’orchestre en short et au melodica roublard, les Pascals sont un peu l’anti-Battles : une petite quinzaine de musiciens jouent une musique tantôt naïve et entêtante, tantôt plus ouvertement libre et désorganisée, mais toujours inspirée. A voir les enfants danser aux premiers rangs et les vieilles dames hocher la tête en rythme sur leurs chaises, on se dit qu’on tient là la démonstration que la musique peut être autre chose qu’un plan promo et une attitude marketée. Un peu d’humour et un sens inné de l’instant remplacent allégrement tout ça.
Un peu plus tard, à la terrasse d’un café, on se dit que finalement on ne s’ennuie pas à Paris l’été. Vivement le week end prochain’