De jeunes Japonais prouvent que les chansons de Bacharach résistent à tout : au papier de verre comme à la soie. Les Japonais ont un bol monstre : ne pas connaître Sacha Distel et sa reprise répugnante de Teardrops keep falling on my head ici-bas connu sous le nom de Toute la pluie tombe […]
De jeunes Japonais prouvent que les chansons de Bacharach résistent à tout : au papier de verre comme à la soie.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Les Japonais ont un bol monstre : ne pas connaître Sacha Distel et sa reprise répugnante de Teardrops keep falling on my head ici-bas connu sous le nom de Toute la pluie tombe sur moi, pouah. Ainsi peuvent-ils encore croire, sacrés veinards, en ce vieux postulat affirmant qu’on ne peut, même avec la plus crasse absence de talent, réussir à totalement bousiller une chanson de l’immense Burt Bacharach. En France, puisqu’on possède le champion du monde du massacre à la tronçonneuse diesel en la personne de Sacha, personne n’oserait entreprendre ce genre d’albums hommages aux chansons devenues sacrément glissantes de Monsieur Tube en personne. Un Burt Bacharach comiquement remis en selle par la déferlante easy-listening, dont on trouve aujourd’hui des bacs dans les boutiques les plus huppées alors qu’hier on devait acheter ces albums comme des revues dégueulasses, au troisième sous-sol des supermarchés du disque, entre les compils Mario Faravelli reprend les Kinks à la trompette et George Jouvin plays My Bloody Valentine. L’intérêt de cette compilation japonaise, où les espiègles Pizzicato Five croisent le remarquable DJ Krush, est justement de révéler des chaînons manquants, ceux qui lient la pop éblouissante de Prefab Sprout et les expérimentations snobs et sensuelles de labels comme Mo’Wax. Des liens qui, pour l’instant, n’existaient que dans nos rêves les plus fous d’évolution d’une certaine espèce élégante mais jamais frivole, souriante mais jamais castrée d’états d’âme , avec un Burt Bacharach très bien dans le rôle du premier homme sur terre. On en rêvait et le Japon l’a fait : faire cohabiter une reprise qu’on jurerait arrachée au silence un peu longuet de Prefab Sprout (le mélancolique et magnifique With a smile, par Jene Miller) avec ces déhanchements gandins et badins qui firent d’ABC ou des Blow Monkeys la risée scandaleuse des gardes suisses du temple rock (Are you there with another girl’, par Carnation, à ne surtout pas confondre avec Tarnation). Ici, chez les plus maniaques copistes du chic occidental, pas une note de travers, pas un cheveu en bataille : dans le bar à cocktail, on danse la bossa de Make it easy on yourself (repris en main par Kyotto Jazz Massive) avec un spleen coquet sur le visage ou un slow terrible pendant que Burt Bacharach lui-même prépare un langoureux Mulino bianco derrière le comptoir. Puis on se jette dans un twist céleste alors que Les 5-4-3-2-1 se lancent dans un Bond Street toujours époustouflant déjà repris par Stereolab, avec un certain panache. Même l’effarant manque de grâce de 5th Garden pour qui, visiblement, un Burt Bacaharch vaut bien un Jean-Claude Petit n’arrive pas totalement à humilier I’ll never fall in love again. Un seul Sacha Distel au monde et il a fallu qu’il tombe sur la France : même les satellites fous ont l’amabilité de nous épargner ce genre de supplice, préférant dignement s’abîmer en mer.
{"type":"Banniere-Basse"}