Protégée de l’intelligentsia dance anglaise, Beth Orton chante un folk plus vieux qu’elle, à la raideur voluptueuse. C’est quand même incroyable comme on se fout de notre gueule, avec un aplomb du tonnerre. Si on croyait encore la presse anglaise, Beth Orton, ce serait ça : la cousine Beth de Portishead, trip-hopelly correcte, total-Bristol. Eh, […]
Protégée de l’intelligentsia dance anglaise, Beth Orton chante un folk plus vieux qu’elle, à la raideur voluptueuse.
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C’est quand même incroyable comme on se fout de notre gueule, avec un aplomb du tonnerre. Si on croyait encore la presse anglaise, Beth Orton, ce serait ça : la cousine Beth de Portishead, trip-hopelly correcte, total-Bristol. Eh, les gars, vous avez vu qu’il y avait un disque avec la biographie ? Que si l’anguleuse chanteuse a effectivement fait ses armes du côté de la dance indansable les fameux Red Snapper, Primal Scream, Chemical Brothers ou William Orbit , elle joue désormais un folk tout à fait ancestral, qui n’a jamais mis les pieds en club, musique souvent pucelle de tout beat. Un folk raidement anglais, comme adoré chez Nick Drake, John Martyn, Bridget St John ou Sandy Denny, médiéval et glacial, à peine repeint çà et là à la bombe fluo-hip (Tangent, Galaxy of emptiness) pour voler l’argent de poche des plus jeunes petits imbéciles accros aux jeux électroniques et aux boîtes à rythmes. C’est justement quand sa musique sent le plus le renfermé la vieille chaussette seventies , lorsqu’on n’y sent pas les courants d’air du temps, que les chansons de Beth Orton enchantent : comme sur le scandaleusement romantique Don’t need a reason, avec ses violons sages et tendres, comme sur le frêle Sugar boy, chanté très exactement comme s’il s’agissait de réciter Five leaves left, comme sur un Whenever aux manières d’une autre époque (comme sa chanson, Beth Orton est née en 1970), comme sur un Someone’s daughter qui pourrait faire de sérieux torts à Suzanne Vega qu’elle déteste, bizarrement. Pourtant, Trailer park s’offre aussi de spectaculaires dérapages vers la pire country-rock américaine après tout, Beth Orton est amie avec les Rockinbirds, ces cowboys d’opérette de Norwich , vers ce qu’on peut faire actuellement de plus agaçant avec une femme et des chansons (soit Alanis Morissette) : Live as you dream ou une reprise vraiment godiche du I wish I never saw the sunshine des Ronettes. Deux fautes sans gravité, car éclipsées par un groupe à la fois savant et suave, réparant les petits accrocs d’une écriture parfois un rien trop délicate. Ce n’est pas souvent qu’on félicite un guitariste, mais là, il faut absolument, au générique, applaudir Ted Barnes, le seul folkeux authentique d’un groupe à l’hétéroclisme encourageant pour la lutte contre les dogmes : un Sandals à la batterie, un Red Snapper à la contrebasse. Il faut féliciter la production du toujours élégant Victor Van Vugt (Tindersticks, Nick Cave), qui prouve à chaque occasion que sobriété et aridité ne marchent pas forcément main dans la main. Il faut également remercier un certain Riding, cité sur la pochette pour avoir fait découvrir à Beth Orton un disque fondamental : The New folk sound of Terry Callier, disque après lequel le folk n’aura plus jamais le même goût. Chaque jour, on découvre de nouveaux membres dans notre secte des Adorateurs de Terry Callier : aujourd’hui, une fille de 26 ans, de presque deux mètres, dont l’intégration a été votée à l’unanimité.
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